Quelques thèses sur le mouvement des partisans italiens

Nouveau débat

Je pense que l'on peut accepter "en principe" la thèse de Leo Valiani qui dans l'alternative "révolution ou restauration" indiquait les deux termes de la lutte partisane en Italie.

Vingt années de régime fasciste devaient aboutir à une guerre idéologique qui se proposait l'écrasement de ce mème régime. Peu importe si le cri de guerre des partisans s'éxsprimait dans une forme néo-romantique "Morte al fascismo, libertà ai popoli" ou bien dans une forme pittoresque et plébéienne "Abbasso la casa savoia la casa dei boia, la vacca regina", le fait c'est qu'on chantait aussi l'Internationale de Lénine.

Les catholiques (Del Bo) veulent donner un contenu exsclusivement éthique et réligieux au mouvement partisan et à l'appui de leur thèse ils portent les lettres des Condamnés à mort (publiées par Pirelli et Malvezzi) où, évidemment très fréquentes sont les expressions qui parlent de tolérance, de foi dans des valeurs éternelles; mais ils ne prennent pas en juste considération le thème, toujours présent, dans ces mêmes lettres de la necessité de nouvelles structures économiques et sociales.

Il ne faut non plus oublier que le régime fasciste et la débacle militaire avaient prolétarisé la majeure partie de la société italienne.

En outre la lutte partisane n'avait pas un caractère simplement national, mais elle se déclenchait aussi sur un plan international, c'est à dire contre l'impérialisme raciste des Nazis en Europe et

contre l'impérialisme des Japonais en Asie.

Si une véritable révolution n'a pas eu lieu, c'est que l'action n'était pas soutenue par une adéquate idéologie révolutionnaire.

On peut aussi être d'accord avec Valiani quand il affirme qu'en Italie la contre-révolution est commencée au moment où le chef du p.c.i. qui se présentait avec l'étiquette d'un parti révolutionnaire, acceptait de collaborer avec le roi. En agissant de la sorte, non seulement il sauvait la monarchie, mais il favorisait le maintien de la plupart des structures du régime fasciste.

Malheureusement Valiani n'analyse pas suffisemment toutes les causes qui ont poussè les chefs communistes à agir ainsi: en effet la Russie pour des raisons diplomatiques et d'équilibre international de puissance, ne voulait pas encourager des mouvements révolutionnaires soit en Italie soit dans les pays d'influence russe.

D'ailleurs après la mort de Lénine, la Troisième Internationale, n'était plus un instrument révolutionnaire mondial.

Il est probable que Staline ait conseillé Mao Tse Toung de collaborer avec Ciang Kai Scek sur un Front national et, ce qui semble un paradoxe le refus de Mao de se soumettre aux directives de Staline, favorisa, en définitive, la politique de puissance de la Russie au-delà même des projets de Staline.

Pour revenir au mouvement partisan italien, d'un grand intérêt est la documentation socialiste (Carli Ballola). En effet le parti socialiste italien, grâce à son autonomie, se tenait, à partir de 1944, sur des positions nettement et validement républicaines.

Les très nombreux documents qui devaient témoigner des idéologies et des alliances politiques des fronts pendant la lutte partisane en Italie avaient été au début élaborés à l'étranger, ce qui n'est pas grave, mais surtout ils ne répondaient pas à la réalité du moment.

Presque tous les partisans les ignoraient où tout au moins ils ne leur donnaient pas l'importance qu'on voulait leur attribuer. En outre les Comités de Libération, nés des rencontres politiques, préparées par ces documents, étaient en conséquence pratiquement stériles.

Il est facile aujourd'hui, aux soi-disant idéologues purs, de souligner le syncrétisme idéologique, la confusion, etc. de ces documents. Mais s'il est vrai que la lutte partisane n'avait rien à voir avec ces documents, il est aussi vrai que cette critique est spécieuse et par là tout à fait inutile; parce qu'elle fait un procès à des ombres et non pas à des faits historiques. Quelle valeur peut-elle donc avoir?

Si tous les mouvements partisans ont avorté, la cause en est au stalinisme en tant que force historique conservatrice.

Pour connaître dans sa réalité l'esprit des mouvements partisans d'Italie et des différents pays il reste encore des chapitres d'histoire à écrire. Le chapitre de la rébellion des partisans contre les Comités politiques qui voulaient le compromis; le chapitre de la lutte contre les armées qui avaient, d'abord, combattu a côté des formations partisanes et ensuite avaient reçu l'ordre de les dissoudre, et enfin le chapitre de l'insurrection contre les Gouvernements établis après l'armistice et qui bientôt se trasformèrent en instruments anti-partisans.

De même, la Révolution française, qui dans les rues et dans le places avait trouvé côte à côte la bourgeoisie et le prolétariat, s'était à la fin transformée en instrument anti-prolétariat.

Luciano Raimondi