Le syndicat mène les grévistes à la défaite à l'usine Tyson

Après treize mois de lutte, la grève à l’usine de transformation de viande Tyson, au Wisconsin, s’est terminée dans l’amertume lorsque les travailleurs et les travailleuses

furent forcés d’accepter la même offre contractuelle qui les avait amenés à débrayer en premier lieu. Le contrat a mis en place une échelle de salaire moins élevée pour les nouveaux engagés et a augmenté le montant que les travailleurs et travailleuses doivent payer pour leurs soins de santé. Seulement 100 travailleurs ont pu reprendre le travail immédiatement tandis que les autres ont dû attendre que le contrat de travail des briseurs de grève arrive à échéance.

Les responsables du syndicat ont tenté de faire bonne figure en affirmant qu’ils avaient pu au moins sauver le syndicat et qu’ils pourront éventuellement reprendre la lutte. Le coup final fut assené le 11 mai, quant le Conseil national des relations de travail (National Labor Relations Board) a jugé que plusieurs des 450 ouvrières et ouvriers qui firent grève n’avaient pas le droit de reprendre leurs boulots malgré le nouveau contrat martelé et conclut entre les responsables syndicaux et la compagnie. En avril, les Travailleurs et les Travailleuses Unis de l’Alimentation et du Commerce (UFCW) avaient négocié à rabais le coût du travail en créant un système de salaire avec une clause "grand-père" discriminant les futurs employés, et en forçant les employé (e) s à accepter une prime d’assurance santé plus élevée, sans augmentations de salaire.

Comme avec la grève dans les chaînes d’alimentation du Sud de la Californie, où 59,000 travailleurs et travailleuses étaient en lock-out depuis 19 mois, les UFCW ont fait ce que tous les syndicats contemporains font: ils ont donné aux employeurs tout ce qu’ils désiraient.

Tout au cours de la grève de Jefferson, les travailleurs ont attiré beaucoup d’attention médiatique, notamment une émission spéciale de Bill Moyers sur PBS et un article de AP qui donna à la grève une visibilité nationale pendant quelques temps. Même le président de l’AFL-CIO, John Sweeney vint dans la petite ville de Jefferson et fit un discours aux travailleurs et aux travailleuses ainsi qu’à leurs supporteurs. Les gauchistes locaux vinrent “supporter” les prolos, c’est-à-dire soutenir les chefs syndicaux. Une fois la grève vaincue, les gauchistes officiels de la région avaient déjà quitté les lieux en emportant leur attention au prochain "goût du jour" et en se consolant d’avoir au moins “fait quelque chose”.

On se doit de demander aux défenseurs et aux réformateurs des syndicats à quoi un

syndicat peut-il servir s’il n’est pas en mesure de négocier autre chose que la somme des concessions que les travailleurs-travailleuses doivent faire? La mythologie régnante à propos des syndicats veut qu’ils défendent les travailleurs. Les vieilles formules qu’ils récitent, les façons avec lesquelles ils mènent leurs “luttes”, tiennent plus de la liturgie religieuse que d’une considération réelle de ce qu’affrontent les travailleurs lorsqu’ils sont en lutte. Sans aucune capacité de mener cette lutte et de gagner des concessions, les syndicats servent simplement à canaliser la volonté des prolétaires de se battre, en empruntant la voie la plus acceptable à la bourgeoisie. La seule voie acceptable par la bourgeoisie est celle menant à la défaite des travailleurs.

La fonction des syndicats est d’être un instrument de contrôle des travailleurs et des travailleuses. Ils sont utiles pour ce qui est de mobiliser les prolétaires en faveur des partis bourgeois, ils sont déterminants pour ce qui est de faire accepter aux prolétaires des concessions, et finalement, ils enseignent ainsi aux prolétaires qu’ils ne peuvent gagner contre les patrons. Alors qu’avant la Première Guerre mondiale, les syndicats ont peut-être été des “écoles du socialisme”, aujourd’hui ils ne nous apprennent que la défaite. Il ne s’agit pas seulement de réformer le leadership syndical pour le rendre plus actuel. Le leadership des syndicats n’est pas la question qui devrait préoccuper les militants de la classe ouvrière. La vraie question doit être de quelle manière il peut être possible d’agir au-delà des syndicats, d’échapper aux limites imposées par le légalisme bourgeois, et comment mener une vraie lutte.

ASm