Contre l’exploitation, la crise et les guerres :

Il faut s’organiser

Nous vivons dans un monde de plus en plus périlleux. Le capitalisme est embourbé dans sa crise la plus profonde depuis huit décennies. La baisse tendancielle du taux de profit a mené à une stagnation des investissements. Ses effets sont visibles partout. Ceux-ci comprennent la destruction de l’environnement qui menace de plus en plus l’existence même de la vie sur cette planète.

À travers le monde, les gouvernements n’ont pas cessé d’attaquer les conditions de vie de la classe ouvrière, dans une tentative infructueuse de réduire le fardeau de la dette causé par la spéculation financière.

Parallèlement, la crise économique a mené à des actes d’agression et à des conflits militaires dans plusieurs régions de la planète. Que ce soit en mer de Chine méridionale, au Moyen-Orient ou en Ukraine – les puissances impérialistes se préparent partout à un conflit ouvert.

La guerre et la barbarie croissante

Il semble que nous sommes dans la phase embryonnaire d’une guerre mondiale. En attendant, la ligne de front des conflits impérialistes traverse toutes les aires géographiques, comme les tueries de Bruxelles, Bagdad, Beyrouth, Istanbul et Ankara ces derniers mois l’ont démontré. Le terrorisme de l’intégrisme islamique est une expression du conflit entre puissances impérialistes, et/ou de celles qui prétendent le devenir. Parrainé et soutenu au départ par les États-Unis contre l’Union soviétique et quelques régimes nationalistes arabes, l’État islamiste (EI) a par la suite bénéficié des faveurs des monarchies pétrolières de la péninsule arabique et a profité du silence complice de la Turquie. Cependant, il a maintenant échappé au contrôle de ses partenaires et joue maintenant à sa guise sur l’échiquier mondial.

Aujourd’hui, l’EI est le point de référence central de toutes les forces intégristes. Il mène sans doute une guerre asymétrique, mais ses bombardements ont la même logique que ceux de son ennemi « occidental ». Alors que ce dernier massacre des paysans et des bergers sans défense avec les armes les plus modernes, l’EI s’emploie à exterminer des travailleurs et des travailleuses sans défense se rendant à leur travail en se servant de méthodes brutales plus rustiques.

Mais le but et le contenu sont identiques. La seule différence est qu’un camp cache ses objectifs par la prétention de la démocratie, alors que l’autre se base sur une version particulièrement obscurantiste et réactionnaire d’une religion. Mais cela ne représente rien d’autre que les deux facettes de la même pièce de monnaie. Les deux parties rivales se fondent sur l’exploitation et l’asservissement de la classe ouvrière, et dans le cas particulier de l’intégrisme islamique, en ayant recours à des formes médiévales de répression. Cependant, même si l’intégrisme islamique exhale la putréfaction, elle trouve de la sympathie parmi la jeunesse immigrante prolétarisée. Grandissant dans les banlieues misérables des grandes villes, soumise à une discrimination raciale quasi-quotidienne, cette jeunesse vit dans des conditions caractérisées par le chômage, la précarité et les bas salaires.

C’est une vie lugubre, sans espoir de changement. L’expérience du capitalisme d’État, qui à la joie de tous les réactionnaires fut mensongèrement présentée comme le « communisme », et toutes les campagnes de propagande massive de la bourgeoisie conduisirent à toutes sortes de confusions et de mystifications. L’insatisfaction et la frustration sont profondément ancrées, mais une alternative sociale est pour plusieurs à peine imaginable, encore moins, tangible. Le « Printemps arabe » qui suscita au début de grands espoirs n’a mené à aucun progrès significatif. Dans ce climat d’existence socialement exsangue, la propagande intégriste puissamment financée trouve un terrain fertile parmi une partie de la jeunesse. Cette propagande fait miroiter la perspective d’une vie ayant enfin un sens, aussi scandaleuse et autodestructrise soit-il, comme chair à canon (contre eux-mêmes et contre les autres) au service des intérêts économiques et stratégiques d’un des segments les plus réactionnaires de la bourgeoisie mondiale. Cela démontre dramatiquement comment, étant donnée l’absence d’un point de référence politique organisée dans la classe ouvrière, la colère de larges sections du prolétariat peut être accaparée par la classe dominante et utilisée contre le prolétariat lors de conflits entre factions bourgeoises.

La guerre, la misère et la migration

La guerre augmente l’importance d’une caractéristique essentielle de l’existence prolétarienne depuis toujours : la migration. À travers toute l’histoire de son développement, elle a été une classe de migrants et de migrantes, une classe de personnes qui ont été obligées de quitter leurs foyers pour vendre leur force de travail partout où le capitalisme en avait besoin. Cela fut et est toujours la seule alternative à la faim et à la misère dans un système social où seule la soumission à l’impitoyable loi du profit rend la vie possible.

En plus de cette migration « traditionnelle », il y a des millions de personnes qui tentent de fuir l’horreur des guerres impérialistes. Ces personnes passent par les filets de trafiquants d’êtres humains sans scrupule. Si elles parviennent à se rendre dans les pays « riches », elles sont réduites à travailler dans les secteurs où l’exploitation est particulièrement brutale, où les salaires sont extrêmement bas et où les conditions de travail sont notablement difficiles. Elles sont prises en otage par des conditions de résidence racistes qui constituent une arme puissante aux mains de leurs employeurs, et qui les maintiennent dans des conditions de soumission telles qu’elles affaiblissent la capacité combative de la classe ouvrière dans son ensemble. C’est pourquoi certains capitalistes jouent la carte humanitaire et accueillent les migrant-es. D’autres au contraire, qui bien entendu ne rejettent pas l’exploitation des migrant-es en font des boucs émissaires, les rendant responsables de la misère sociale. Leur stratégie consiste à alimenter l’anxiété et l’hystérie généralisée dans la société, y compris au sein de la classe ouvrière, qui perturbée par la crise et en raison de l’absence d’alternative politique et sociale tangible, est complètement désorientée. Dans un tel contexte, la propagande populiste de droite, nationaliste et néofasciste peut être déchaînée presque sans entrave contre les migrant-es et les musulman-es, les caractérisant comme des ennemis de la culture nationale et ses valeurs. C’est un coup monté qui fonctionne souvent parfaitement, surtout dans cette période économiquement difficile d’insatisfaction sociale et de confusion politique. Diviser pour régner – voilà ce qui a toujours été un des principes organisationnels essentiels de la société capitaliste.

Guerre impérialiste ou révolution prolétarienne?

Avec notre expérience de travail, que ce soit comme salarié-es à temps plein, comme précaires ou comme sans-emploi nous connaissons bien quelles contre tendances la classe dominante utilise contre nous en vue d’enrayer la crise de son système : la réduction des coûts de production (insécurité, flexibilité, mises à pied et chômage massif), le transfert de la production vers les régions à bas salaires, les compressions dans les retraites, les dépenses publiques, la santé, l’éducation et le transport en commun. Bref, les compressions dans le salaire indirect et différé, là où ils existent encore. La guerre de classe des riches n’a cependant pas encore suscité une riposte suffisante de notre part.

La financiarisation de l’économie qui s’exprime par une spéculation financière sans précédent est également un symptôme des grands problèmes qui secouent l’économie mondiale et une tentative de les contourner. On tente de nous vendre l’idée que l’argent peut-être fait d’argent et que le processus de production peut être escamoté.

Les masses de richesses immenses accumulées dans les paradis fiscaux d’une part, et l’intensification brutale de l’exploitation d’autre part, exposent la nature corrompue et spoliatrice du capitalisme. Le démantèlement continuel des programmes sociaux et la destruction croissante des ressources environnementales éclairent l’état des lieux : le maintien du capitalisme est incompatible avec la survie de la classe ouvrière, de l’humanité et de l’existence même sur cette planète.

Notre ennemi principal est dans notre propre pays! Ce sont « nos patrons et nos capitalistes » qui nous exploitent et nous accablent d’une vie de misère. Mais tous les États, toutes les nations, toutes les forces politiques qui de quelque manière que ce soit participe à la guerre et/ou la préparation de futures guerres est aussi notre ennemi. Pour la classe ouvrière, il n’y a qu’une voie pour échapper à la spirale meurtrière de la crise et de la guerre – le rejet sans appel de toutes les idéologies nationalistes, la solidarité internationale et le combat de classe unifié pour la satisfaction de nos besoins. La seule guerre qui mérite d’être menée est la guerre de classe contre l’exploitation. Pour une société sans exploitation, oppression et racisme. Une société dans laquelle les moyens de production sont socialisés et non plus la propriété de capitalistes privés ou d’État. Une société dans laquelle la production et la distribution sont en harmonie avec l’humanité et la nature et où « le développement libre de chaque personne permet le libre développement de toutes les personnes ».

Vers un parti de la classe ouvrière

En tant que système mondial, le capitalisme ne peut être combattu et renversé qu’au niveau international. Cela exige une structure organisationnelle, la construction d’une organisation politique avec des racines et une implantation mondiales. Une telle internationale et un tel parti communiste internationaliste ne doit pas être un instrument de domination ni définitivement pas une machine électorale. Cette internationale doit être à la fois un lieu de réflexion politique et un point de départ pour l’assaut contre l’idéologie, les rituels et les formes politiques de cette société. Sans un programme communiste ancré dans la classe, chaque grève, chaque révolte et chaque insurrection seront inévitablement absorbées par les forces de ce système comme nous l’a démontré les expériences des dernières années.

La classe ouvrière n’a pas de patrie et il en va de même pour l’organisation des communistes. Le premier pas vers une réelle rupture avec le capitalisme commence par le regroupement politique international des révolutionnaires. L’objectif de la TCI est de contribuer à ce processus. Nous sommes pour le parti mais nous ne sommes pas le parti ni nous ne sommes pas l'unique noyau, mais nous croyons pouvoir contribuer positivement selon les lignes des acquisitions politiques de la Gauche communiste qui ont guidé notre analyse et notre engagement dans la lutte des classes. Notre objectif stratégique dans la période actuelle est de rompre les conditions d’isolement et de fragmentation des forces internationalistes. La domination du capitalisme couvre la planète entière et pénètre tous les aspects de la vie. Mais cette domination peut être défiée si nous comprenons comment déployer, dans les luttes quotidiennes contre l’État et le capital, l’arme qui est nécessaire pour combattre l’idéologie bourgeoise : le parti mondial de la révolution socialiste. Il est temps de s’organiser!

La Tendance communiste internationaliste, le 1er mai 2016.

Sunday, May 1, 2016