Après le Sommet

Nous laisserons à d’autres de dresser le bilan du spectaculaire; les dizaines de milliers de manifestants et de manifestantes, les 7000 flics, les mille soldats, les grenades fumigènes et lacrymogènes, les balles de plastic et de caoutchouc, les combats de rue, les centaines d’arrestations et les dizaines de blessé-e-s.

Ce qui nous intéresse maintenant, c’est de bien saisir l’évolution de la conscience prolétarienne depuis les événements entourant le Sommet de Québec. Soulignons d’abord ce qui semble avoir avancé. En premier lieu, l’action syndicale et communautaire de compromission et de suffocation des luttes a été telle, que les illusions sur le rôle et la place réelle des syndicats et des institutions associatives à cette étape du capitalisme ont été sérieusement ébranlées pour des centaines de prolos, particulièrement chez les plus jeunes. Déjà, les bureaucrates les plus habiles et les plus opportunistes s’affairent à réaliser du “damage control” en se donnant un nouveau vernis contestataire, par la critique des “maladresses” les plus grossières de certains de leurs collègues. On pense ici notamment aux sinistres ronds-de-cuir du Frapru et à un certain nombre d’arrivistes de la “gauche syndicale”. Un autre aspect positif est le recul d’une certaine forme de nationalisme: le plus éculé, celui de la langue et de la race... Toute la fin de semaine, il faisait beau de voir les manifestants et les manifestantes de toutes les Amériques se serrer les coudes, de s’unir dans la lutte, au-delà des futiles différences de langues et de nations.

Mais il n’y a pas eu que du bon, loin de là. Le recul de ce nationalisme à visage découvert a été accompagné par la montée d’une autre forme de nationalisme, plus suave et donc plus pernicieux. Il s’agit de cet appui massif pour des programmes de protectionnisme économique, social ou environnemental. Cela prend la forme d’un anti-américanisme vulgaire et disculpant du système capitaliste, en tant que système totalitaire. Ainsi, on a pu voir des milliers d’étudiants et d’étudiantes manifester pour préserver le système d’éducation canadien de la menace d’une invasion des institutions scolaires américaines. Or, il y a peu de temps, à l’occasion de la visite du Premier ministre Chrétien en Chine, environ le quart (98) des 400 délégationss qui l’accompagnaient (Team Canada) étaient des établissements scolaires canadiennes, intéressés à investir le marché chinois... De même, pendant qu’on s’inquiétait de l’impact sur notre environnement de la future Zone de libre-échange des Amériques (les États-Unis nous dicteraient nos normes...), on oublit commodément que le Canada est d’ores et déjà le deuxième pollueur mondial malgré une population relativement petite! Ah, les mystères du protectionnisme...

Enfin, toute la mobilisation, incluant celle des gauchistes et ce que nous pouvons appelé la mouvance “démocrate radicale”, s’est déroulée sous les diverses bannières de la “défense de la démocratie”. Quand on réalise l’importance que prend la forme démocratique dans le maintien de la dictature du capital, cela n’augure rien de bon. Qu’il y ait une aile croissante du mouvement “anti-mondialiste” qui se réclame de l’anticapitalisme est un fait. Mais il demeure que cet “anti-capitalisme” est fadasse et dérisoire et le restera tant qu’il se complaira dans sa “pluralité” petite-bourgeoise, qui n’est rien d’autre que l’expression de sa confusion inter-classiste.

Le bilan de toute l’histoire de l’humanité est une confirmation claire que nous nous faisons un devoir de réaffirmer: la fin du capitalisme exclut à l’avance toutes formes de solution nationale ou démocratique. La révolution à venir sera le fait de l’action de la classe ouvrière ou elle ne sera pas. Elle nécessitera une préparation internationale et une solide organisation révolutionnaire. Notes Internationalistes et le Bureau International pour le Parti Révolutionnaire auquel nous sommes associés ne sont pas cette organisation, mais nous travaillons ardemment à sa construction. Nous faisons appel aux vrais anticapitalistes d’à travers le monde à nous aider dans ce travail crucial. Camarades, les véritables sommets sont devant nous!