Les grévistes de la Horne face à un rude combat - Rouyn-Noranda

515 travailleurs de la fonderie Horne à Rouyn-Noranda, une ville minière de 27 000 habitants située à 615 kilomètres au nord de Montréal, sont en grève depuis le 18 juin 2002. Les travailleurs ont soutenu la proposition de grève du syndicat CSN en raison d’une menace à peine voilée à l’ancienneté et à la sécurité d’emploi présente dans les offres patronales pour le renouvellement de la convention collective. Cependant, la grève fut déclenchée sans réelle discussion sur la conjoncture. Le prix de la majorité des métaux vils est présentement très peu élevé et il semble que la compagnie ait leurré les travailleurs dans un lock-out déguisé. Même si l’ancienne convention était échue, rien n’obligeait les travailleurs à une grève immédiate puisque les stipulations du vieux contrat se seraient prolongées. Cela aurait probablement forcé la compagnie à faire connaître son jeu et imposer un lock-out, ce qui aurait clarifié ses véritables intentions. Même si la compagnie a subi une perte nette de 700 millions en 2002, seulement 25 de ces millions sont dus au conflit. La fonderie fonctionne à 70% de sa capacité avec l’aide de 300 "cadres", un ratio incroyable d’un cadre pour 1.8 ouvriers! (1) Des jaunes sont aussi utilisés sous la couverture de sous-traitants. (2) Les brutes de l’agence de sécurité Avant-Garde de Montréal ont aussi été engagées pour intimider les piqueteurs. Le nouveau maire de la ville, Jean-Claude Beauchemin, un ancien gauchiste qui se disait bordiguiste et qui se prétend maintenant vaguement libertaire a fait appel à l’escouade anti-émeute de la Sûreté du Québec pour assurer la compagnie de sa plus complète soumission.

La grève a reçu relativement peu d’appui populaire dans la communauté puisqu’elle est vue par plusieurs comme étant une erreur tactique. (4) Le Groupe Noranda, qui est le propriétaire de l’usine a récemment fermé sa fonderie de Murdochville en Gaspésie, ce qui a presque tué la ville. Il vient aussi de liquider Magnolia, son usine de magnésium des Cantons de l’Est. La compagnie laisse maintenant entendre qu’elle pourrait fermer la fonderie historique Horne et déménager ses opérations à l’usine Kidd Creek près de Timmins en Ontario, à 210 kilomètres à l’ouest. À l’exception de quelques contributions monétaires importantes en provenance de travailleurs miniers du Nord-Est de l’Ontario, très peu de solidarité a été offerte aux travailleurs en lutte. Pire, nous avons appris de bonne source que le syndicat rival des Métallurgistes Unis d’Amérique prépare déjà un maraudage de l’usine dès la prochaine occasion légale!

La grève a sévèrement touché les travailleurs et leurs familles. Les "company towns" telles Rouyn-Noranda sont par définition très dépendantes des décisions d’affaires des capitalistes pour leur simple survie. Le petit fonds de grève de 200 dollars par semaine ne suffit tout simplement pas à nourrir les familles et à faire les paiements sur les maisons. Même si le Fonds de grève de la CSN est important, l’argent supplémentaire prêté aux grévistes dans le besoin l’est à un taux de 12% d’intérêts! Malgré tous ces facteurs défavorables, les travailleurs ont décidé de continuer à se battre dans une proportion de 73% lors d’une assemblée générale tenue peu avant Noël. Cependant, cette fois leur combativité n’arrivera peut-être pas à gagner la partie. Ils ont absolument besoin de la solidarité active des travailleurs des mines et des fonderies de toute la région. De l’appui financier et des grèves de solidarité sont nécessaires de toute urgence pour permettre à ces camarades de s’en sortir. C’est là le message que le GIO porte à chaque travailleur et à chaque travailleuse que nous rencontrons, y inclus nos contacts sur les piquets de la Horne.

Dernière heure!

La compagnie vient d'annoncer que peu importe l'entente qui sera conclue, 125 travailleurs perdront leurs emplois même si elle entend faire fonctionner l'usine à plein rendement.

Victor

(1) Pourquoi le syndicat a permis à la compagnie d'embaucher autant de techniciens sous l'appellation de cadres nous dépasse!

(2) Il est important de noter que les jaunes jouent un rôle important dans cette grève même si l'usine est sous la juridiction de la célèbre loi anti-scab du Québec. Dans le cas du lock-out de Vidéotron, traité ailleurs dans ce bulletin, la compagnie est sous la juridiction du gouvernement d'Ottawa qui n'a pas de prétendue loi anti-scab. Les directions nationalistes des syndicats dénoncent régulièrement le gouvernement fédéral pour n'avoir pas adopté une telle législation tout en oubliant commodément que le gouvernement provincial n'applique même pas sa propre loi. De toute façon, les prolos n'ont pas besoin des lois hypocrites de l'État bourgeois! Nous n'avons besoin que de notre unité de classe, d'une stratégie correcte et de tactiques appropriées autour des piquets de grève si nous espérons vaincre.

(3) Une autre raison qui explique le faible appui populaire à la grève est que le syndicat ne s'est pas soucié de la menace mortelle de la bérylliose qui plane sur les travailleurs et les familles demeurant à proximité de la fonderie. Les travailleurs de Noranda sont célèbres pour la lutte qu'ils ont mené il y a 20 ans contre la silicose et d'autres formes de maladies liées à la pollution industrielle. Si le syndicat avait fait face à la menace du béryllium, il aurait rendu un vrai service à ses membres et à la population locale et aurait pu gagner beaucoup plus d'appuis à travers la région, de même qu'à travers la province tout entière, car le métal insidieux est considéré comme un danger réel dans plus de 2800 lieux de travail au Québec.