Thèses sur la précarité et la «Gig Economy»

  1. L’émergence des emplois de la «Gig Economy» ne peut être séparée de la crise continue du capitalisme et de la généralisation de la précarité parmi de nombreuses couches de la classe ouvrière. C’est dans une époque d’austérité, causée par la baisse du taux de profit dans l’économie mondiale, que plusieurs travailleur.euses se voient forcé.es de se trouver un «boulot flexible en extra» afin de survivre face aux coupures des services publics, la hausse du prix du loyer et l’augmentation générale du coût de la vie.
  2. Les nouveaux emplois précarisés de la «Gig Economy» sont en partie définis par leur application des nouvelles technologies digitales. Avec cela, les compagnies entrent en compétition avec d’anciennes formes de service en les centralisant dans des applications en tant que coordinateurs principaux. Des compagnies telles qu’Uber et Foodora utilisent des applications téléphoniques contrôlées par des algorithmes qui font la médiation entre le travail et le capital. L'utilisation de ces applications apparaît comme le rêve capitaliste du calcul obsessionnel consistant à tracer la journée de travail à la seconde près.
  3. Les politicien.nes et les capitalistes de la télévision paraissent presque ému.es en vantant l'esprit d'entreprise et d'innovation de ces compagnies propriétaires et dirigeants. En réalité, ces technologies ont été largement financées par l'État dans le cadre du processus du complexe militaroindustriel et d'autres partenariats tels que les universités. En dépit des illusions bourgeoises colportées, le capital reste tributaire de l'aide croissante de l'État, lequel est complètement soumis aux intérêts du capital.
  4. La capacité de ces entreprises de nouvelles technologies à exploiter pleinement leurs travailleur.euses repose en grande partie sur la méthode utilisée pour les étiqueter non pas comme des employé.es, mais plutôt comme des entrepreneur.euses indépendant.es pour ainsi, permettre au capital de leur refuser les «avantages sociaux» habituellement conférés par le statut de travailleur. De plus, le retour au salaire aux pièces, c’est-à-dire payer les travailleur.euses par nombre de services plutôt que par heure, est l’un des exemples typiques de ce type d’emploi. Combinée à l'élimination constante de l'atelier comme point de référence, ce travail à la pièce appointé digitalement permet au capital de réduire les salaires en opposant les travailleur.euses les un.es contre les autres en dans leur isolation. Cette compétition entre prolétaires cherche à augmenter l'efficacité moyenne des travailleur.euses qui sont constamment menacés d'être calculés indignes de travail. Cela permet à la fois d'intensifier le travail et de prolonger la journée de travail en réduisant les salaires. «Sous ce rapport, le salaire aux pièces devient une source inépuisable de prétextes pour opérer des retenues sur les gages de l'ouvrier et pour le frustrer de ce qui lui revient.» -Marx, Le Capital Livre 1, chapitre 21
  5. Mais malgré la séparation du prolétaire du prolétaire, par l'élimination croissante de l'atelier et malgré le fait que les travailleur.euses non qualifié.es ne sont pas enregistré.es en tant qu'employé.es et sont donc peu ou pas protégés, la lutte des classes dans le «Gig Economy» plonge la classe ouvrière – lors des moments de lutte – directement dans une activité autonome non-médiatisée telle que les grèves sauvages. Des travailleur.euses de Foodora en Italie aux travailleur.euses de Deliveroo au Royaume-Uni, en passant par les chauffeur.euses Uber à Los Angeles, le militantisme dans la «Gig Economy» est en hausse.
  6. La misère des travailleur.euses dans la «Gig Economy» continue de révéler l'une des tragiques ironies du capitalisme. En dépit du potentiel de ces nouvelles technologies numériques de servir l'humanité, elles sont utilisées dans la logique capitaliste comme des instruments permettant d'intensifier et d'organiser une augmentation de l'exploitation. Seule une révolution sociale totale peut éliminer cette misère. La «Gig Economy» n’est qu’un seul élément de cette crise et ses luttes doivent être liées à la lutte totale du prolétariat contre le capital. Lorsque notre classe proclamera son indépendance sur la scène internationale, elle déclarera: "Les prolétaires n’ont pas de patrie, pas plus que les instruments de production une fois expropriés et mis à son service" libérant enfin la technologie des chaînes de profit et vers les besoins de l'humanité.

Klasbatalo

Tuesday, October 29, 2019