Nouveau massacre capitaliste en Méditerranée

Présentation

L'article suivant est une traduction de nos camarades italiens du Parti Communiste Internationaliste (Battaglia Comunista).

La nouvelle du naufrage du bateau de migrants au large des côtes grecques, qui a fait des centaines de morts, est arrivée au même moment que celle des grotesques funérailles nationales accordées à l'ancien Premier ministre véreux et prédateur sexuel, Silvio Berlusconi (pour en savoir plus sur cela voir : leftcom.org). Cela a provoqué la réponse suivante de nos camarades italiens. Depuis qu'il a été écrit, il a été révélé que ce chalutier était stationnaire depuis des heures (et n'était pas en route vers l'Italie comme le prétendaient les autorités grecques). Des interrogations se sont faites jour sur le fait que le chalutier aurait pu couler dès que les garde-côtes grecs ont tenté de le remorquer vers les eaux italiennes. Cette nouvelle a déclenché des protestations aussi en Grèce (voir : aljazeera.com). C'est une mauvaise blague de notre époque ! Comme l'indique l'article, la question n'est pas les migrations (ce que les êtres humains accomplissent depuis la nuit des temps) mais l'existence du système capitaliste avec ses impératifs impérialistes qui crée la misère pour la majorité de la population de la planète la forçant à rechercher une existence plus supportable au centres même du système. Or, ce denier a non seulement créé sa misère, mais encore les causes de la pauvreté.

Depuis lors, il n'aura échappé à personne la différence faite entre la recherche et le bruit médiatique fait autour de quelques millionnaires perdus dans une aventure extravagante avec le sous marin Titan pour découvrir l'épave du Titanic et, par contre, le peu d'entrain pour rechercher les nombreux naufragés suite à disparition du chalutier.

Notre indignation est la même que celle de Rosa Luxembourg dans son article de 1912 par rapport à l'attitude de la bourgeoisie : « Dans l'asile de nuit »

Un nouveau massacre en Méditerranée

Enfin, après quatre jours ignobles consacrés à la disparition de « Dieu merci Silvio,.... est parti », après les éructations des chaînes de télévision et des journaux, qui ont mis en lumière les pires bassesses de la bourgeoisie (c'est-à-dire de presque tous) nous sommes retombés des « étoiles » pour revenir, uns fois de plus, dans ce sordide monde bourgeois et compter encore plus de morts. En mer, des centaines de personnes sont mortes d'un naufrage près du Péloponnèse, aux côtés des milliers d'autres en Ukraine comme dans de nombreuses autres guerres infâmes de l'impérialisme. Parallèlement à tous cela, nous connaissons toujours de nouveaux massacres sur le lieu de travail. Malheureusement, ceux-ci continueront jusqu'à ce que cette société fondée sur le profit soit détruite. Bien sûr, pour la bourgeoisie, des centaines de milliers de morts de prolétaires, de pauvres et de misérables, ne égaleront jamais l'existence d'un riche voleur, et les comparer même à ce dernier passerait pour un blasphème. Nous, par contre, nous dansons sans scrupule sur la mort d'un ennemi de classe, par contre, nous sommes à genoux et atterrés par tant de morts de la responsabilité de la bourgeoisie.

Dans les journaux ces jours-ci, il est difficile de trouver des nouvelles des décès du travail - plus de 60 victimes par mois, déjà plus de 300 en 2023 - car les première, deuxième, troisième, quatrième, cinquième, etc. pages, sont toutes consacrées à la sanctification de Monsieur Milliardaire en plastic [Berlusconi – ndlr]. Il nous arrive de lire dans le soi-disant "journal communiste", Il Manifesto [quotidien italien à tendance éditoriale de gauche - ndlr] du 14 juin : "En 24 heures, six personnes sont mortes au travail : deux dans la région de Brescia". Et puis il continue "Les jours où la mort d'un personnage célèbre arrête le pays, ce qui s'est passé hier à six heures au travail n'est pas - comme d'habitude - une nouvelle". C'est vrai, bien sûr, sauf que le même journal pendant deux jours d'affilée a signé des articles avec tous les "meilleurs" noms, et au-delà, et dédiant la quasi-totalité du journal à un personnage dont la mort ne méritait rien d'autre que d'être accueillie dans le plus grand silence.

C'est le refrain habituel, à tel point qu'Il Manifesto a consacré pas plus d'un seul article à l'actualité en question, même pas sous la signature d'un journaliste du journal (il s'agissait d'un reportage d'agence). Chronique sèche et froide des faits pour six morts anonymes et inconnues, des chiffres simples qui s'additionnent à d'autres chiffres pour faire des statistiques (1 090 décès en 2022, en hausse de 21% par rapport à 2021), des chiffres qui ne "font même pas l'actualité" pour ce journal "communiste" qui préfère concentrer son attention sur un prédateur sexuel. Ces morts au travail ne peuvent être comparés, même de loin bien sûr, à ceux qui meurent dans l'accomplissement de leur devoir de représentant de l'État – qui utilise quotidiennement sa main armée pour tout contrôler. Ceux la ne sont que de la vile chair à canon destinée à renflouer les coffres capitalistes ; eux – notre classe (hommes et femmes) - morts au travail, n'existent pour la bourgeoisie que comme producteurs de richesses, ils n'existent, pour l'économie capitaliste, qu'en tant que producteurs de plus-value. Ils sont l'abstraction d'une abstraction, leur véritable existence ne se manifeste que dans la productivité de leur travail qui crée la marchandise.

Imaginez alors comment cette chair à canon impliquée dans la production de plus-value, qui parcourt le monde, littéralement déracinée de son pays d'origine – soit à cause des guerres entre les différentes factions bourgeoises et impérialistes, soit à cause des dévastations environnementales provoquées par le mode de production capitaliste – devient une nouvelle main-d'œuvre excédentaire sur le marché de l'achat et de la vente de la force de travail. Par ailleurs, il suffit aussi de laisser mourir ces prolétaires/dépossédés pour devenir la nourriture des poissons sans casser les couilles des sociétés civilisées et avancées de l'Occident.

Encore un drame en mer | Encore un massacre de migrants ! Assez! Ça suffit ! On n'en peut plus ! Notre sommeil et nos rêves ne devraient plus être perturbés par ceux qui osent mourir dans notre belle mer Méditerranée. Pourquoi ne pas "les aider à mourir chez eux", loin, le plus loin possible, de nos yeux et de nos oreilles ?

Ceux qui ont osé mourir le jour des funérailles d'État d'un criminel ont gâché la cérémonie, on ne sait pas si c'est un deuil ou une célébration. Quoi qu'il en soit, les massacres en mer se succèdent. Après Cutro, où 94 morts ont été comptabilisés avec un nombre inconnu de disparus, il advient ce nouveau massacre, bien plus grave. Au large de Pylos (Grèce), un bateau chavire avec toute sa « cargaison » ; sur 750 femmes, hommes et enfants, seuls 104 ont été sauvés, donc plus de 600 morts se rappellent à la conscience de la bourgeoisie internationale, à supposer qu'elle en ait une, et si elle en a une, elle a certainement un visage très cynique.

Pour se souvenir d'autres tragédies de cette ampleur, il faut remonter à 2015, où 800 à 1 000 personnes sont mortes au large de la Sicile ; et 500 autres quatre mois plus tard au large de Zwara (Libye). En 10 ans, il y a eu plus de 26 000 morts uniquement en Méditerranée ; du moins selon les chiffres officiels. Le gouvernement de la "La Ducia" [alias Giorgia Meloni - ndlr] a promis une main de fer, "Scipiona l'Africana" (comparée à Scipion l'Africain qui a fait raser Carthage - ndlr) est en tournée et en visite de tous ces pays que son grand-père bien-aimé [Mussolini - ndlr] a passé vingt ans à essayer de conquérir, il y a un siècle. Peut-être que la « Signora Ducia » ne « se souvient » pas des dizaines de milliers de morts causées par ses frères, les chemises noires. D'ailleurs, pour entretenir le fil … « noir » qui la lie à ses prédécesseurs, elle offre de l'argent au sanguinaire dictateur tunisien, Kais Saied.

Dans le cœur des bourgeois, il y a toujours ceux qui se démarquent en faisant appel aux droits de l'homme : "Toute personne à la recherche d'une vie meilleure mérite la sécurité et la dignité", a tweeté le secrétaire de l'ONU António Guterres. "J_e pense que ce naufrage est un signal que notre politique migratoire ne fonctionne pas bien en ce moment et nous allons la changer avec le pacte migratoire_", a déclaré la commissaire européenne aux affaires intérieures, Ylva Johansson. Attitude on ne peut plus culottée ! Et il ne s'agit qu'uniquement deux réactions parmi tant d'autres. Ces derniers ont bouleversé le monde en étant au service des responsables de la tragédie et ils osent parler de dignité, la dignité même qu'ils contribuent à piétiner à chaque minute et chaque jour. Et enfin, ... tragédie après tragédie, ils découvrent que quelque chose ne va pas! Dante Alighieri n'a jamais rencontré une aussi sale engeance bourgeoise.

"Nous avons besoin d'un programme européen de recherche et de sauvetage immédiatement. Un outil public qui prévient les massacres, patrouillant en Méditerranée pour traquer les bateaux en danger et les mettre en sécurité." ( Il Manifesto , 16 juin). Et puis, bien sûr, il y a les "camarades" qui suggèrent ce qu'il faut faire. Bien sûr, bien sûr, il faut comprendre de quelle Europe ils parlent, et surtout de quelle société, peut-être imaginaire. Car ce serait bien nouveau et intéressant de voir les responsables de ce désastre, c'est-à-dire les capitalistes, légiférer contre leurs propres intérêts..

Ces drames ne prendront fin qu'avec la fin du capitalisme, seule sa mort libérera les hommes et les femmes de tels massacres à répétition.

AL
Battaglia Comunista
19 juin 2023
Wednesday, June 28, 2023