Premier Mai 2018 - Contre la guerre et le nationalisme!

Déclaration de la Tendance Communiste Internationaliste

Ce n'est pas le moment le plus heureux: les tensions nationalistes mondiales, la course aux armements et les conflits militaires prennent des proportions dramatiques à mesure que l'exploitation et l'oppression augmentent. Ce ne sont pas des conséquences de tel ou tel politicien égocentrique ou incompétent mais le fonctionnement très profond du système.

Stagnation Économique

Pour la première fois depuis 2008, le FMI ne révisera pas ses estimations de la croissance économique mondiale. Pour les chiens de garde du capitalisme, ceci est le signe que l’économie mondiale est en voie de convalescence. Les voix les plus moroses peuvent cependant indiquer la réalité de ce «recouvrement». Il est une fois de plus prédiqué par la dette – la relance Américaine, par exemple, coïncide avec l’élargissement massif de la dette du crédit. Or, la dette huile les engrenages du système. La dette était supposée se réduire via l’inflation et la croissance. Mais, avec un taux de profit bas, l’investissement a été faible et les politiques d’austérité n’ont fait qu’exacerber la situation.

Selon la Banque des Règlements Internationaux, le fardeau de la dette globale était de 2,25 fois le taux de rendement économique annuel en 2008. Il s’estime désormais à 3,30 fois. Les chiffres du Moniteur des Finances Publiques nous indiquaient en janvier que la dette mondiale (publique et privée combinées) est passée de 17 trillions de dollars en 2006 à un incroyable 233 trillions de dollars aujourd’hui. Nous vivons dans un monde imaginaire ou la production de l’avenir est déjà hypothéquée à l’infini. La prochaine crise financière est non seulement inévitable, mais elle s’approche à grand pas.

Il faut cependant souligner que la crise économique capitaliste perdure depuis beaucoup plus longtemps que la dernière décennie. Son début remonte à la fin du boom d’après-guerre dans les années 1970. Depuis, le prolétariat en paye le prix. De 1979 à maintenant, les salaires comme pourcentage du PIB ont continué de chuter à mesure que la mondialisation entraînait une fuite des emplois vers les économies à maigre salaire. Aujourd’hui, la richesse du monde se tient dans les mains d’une poignée d’individus. Aux États-Unis, par exemple, le fossé entre riches et pauvres est désormais le même qu’en 1917.

Échec politique

L’échec de l’économie se traduit maintenant en instabilité politique. Le conservatisme néolibéral (qui nous a conduit au krach de 2007-8) et le Keynésianisme social-démocrate (qui ne peut même plus financer son État-Providence) ont tous deux échoué dans leur tentative d’éradiquer la misère du monde. Les partis dirigeants d’autrefois ont perdu leur emprise et leur crédibilité. Qu’il s’agisse de l’ébranlement total des États (Syrie ou du Soudan), du Brexit, de l’élection de Trump, de la paralysie politique ou bien de la résurgence de l’extrême-droite, là où l’on regarde, il y a une crise politique.

Une large partie de ce bouleversement est remise sur le dos du « populisme ». Le populisme, sous une forme ou une autre, a toujours été présent mais, tant que les vieux partis capitalistes établis pouvaient prétendre qu’il y avait de l’espoir, il fut confiné aux marges du système. Pour les capitalistes, le « populisme » est maintenant synonyme de la montée de forces alternatives qu’ils croient être une menace pour le système qu’ils contrôlent.

Après quatre décennies de stagnation économique, la montée des organisations populistes a pris plusieurs formes. Le populisme de Gauche (Podemos, Syriza, le Labour Party de Corbyn, « le socialisme » de Sanders) canalise le mécontentement grandissant des travailleur.euse.s dans l’assurance pacificatrice du bulletin de vote, sans avoir un programme qui défie réellement le système capitaliste. De ce fait, il échouera. Le populisme de droite est bien plus dangereux car il est érigé sous la politicaillerie de la peur. Leur message nationaliste ne signifie pas réellement «America First», « maîtres chez nous », et autres banalités. Il est construit sur la peur de l’Autre. Niveau de vie en baisse? C’est de la faute des Juifs, des Musulmans, ou des immigrants en général. Cela a mené à l’augmentation des attaques islamophobes, antisémites et anti-migrant.e.s (eux-mêmes étant déjà les victimes de guerres véhiculées en Afrique et en Asie par les puissances capitalistes).

Ce nationalisme perfide ne finit pas là. En mettant l’accent sur la nécessité de défendre l’économie nationale contre l’Autre – les étrangers – cette xénophobie entraîne le monde sur une voie dangereuse. Le système capitaliste mondial est devenu plus fort après la Deuxième Guerre Mondiale à travers l’économie Américaine et ses institutions qui ont présidé à un boom sans précédent dans l’histoire du capitalisme.

Cela prit fin lorsque les États-Unis ne pouvaient plus maintenir le dollar étalon-or (le fameux gold standard) en 1971. Depuis, le processus est long et lent mais il y a eu le déclin relatif de la domination de l’économie Américaine sur le reste du monde, déguisée par le fait que le reste du monde l’aide à payer sa dette faramineuse en utilisant le dollar comme monnaie d’échange internationale.

Loin de l’économie chinoise dissimulée, ce sont les États-Unis qui ont utilisé de dollar de façon généralisée ce qui a fait ses preuves et sans dépenses supplémentaires. Aucun autre pays au monde ne peut continuer d’imprimer sa monnaie pour couvrir ses dettes croissantes comme le dollar qui circule librement dans tout le globe.

Lorsque la Chine pauvre et en voie de développement, entama la construction de son économie manufacturière et accrut ses échanges avec l’occident il y a plus d’un quart de siècle, elle le fit grâce au Capital américain. Peu de gens auraient imaginé qu’elle serait désormais une géante industrielle du monde. La Chine a déjà surpassé les États-Unis en termes de production industrielle, d’épargne, de commerce et même de PIB (en termes de parité de pouvoir d’achat).

Les États-Unis ont beau toujours être puissants, cependant le conflit commercial que Trump a déchaîné, révèle le degré de perte de sa position de domination mondiale. Auparavant, les États-Unis pouvaient ignorer que la Chine faisait de la propriété intellectuelle et des secrets technologiques, une condition pour l’investissement d’usines bon-marché. Maintenant, les enjeux sont plus élevés et ils ne sont pas uniquement à propos du commerce. Trump cita une loi de 1964 sur la défense de la sécurité nationale Américaine pour l’introduction de son premier tarif sur l’acier. Nous avons déjà atteint un point ou une guerre commerciale fut l’initiatrice d’une guerre stratégique. Ceci n’est pas qu’un simple scenario.

Avec la chute de l’URSS, le triomphalisme américain de la « fin de l’histoire » et du début d’un monde nouveau ne connut aucune limite. Il n’a cependant pas duré. Les échecs en Afghanistan et en Iraq furent combinés avec la montée en puissance de la Chine. Le danger de cette situation repose sur le fait qu’il y a une disparité complète entre la puissance militaire américaine et les autres. Si ses troupes sont présentes presque partout, ses marines contrôlent les zones de cargaison mondiales et sa dépense sur la défense dépasse le double de celle de la Chine et de la Russie réunies. Sa la croissance chinoise continue, et ses initiatives en Afrique et en Asie prospèrent comme autrefois, les États-Unis verront une diminution prolongée de leur pouvoir.

La pression en faveur d’une action militaire préemptive s’accroit et les rendez-vous récents de Trump avec Bolton et Pompeo rapprochent la probabilité qu’un tel recours ait lieu. Derrière eux se cache les think-tanks Américains appelant à l’action pour faire halte à la Chine. Comme nous l’avons souvent écrit, les guerres commerciales furent les précurseurs des guerres de tir. Aucune garantie que la longue agonie de la présente crise économique ne finisse pas de la même façon.

Une seule alternative

La seule puissance capable d’arrêter cela est le prolétariat international, la majorité de la population mondiale. Bien que la classe fût en retrait pendant des décennies souffrant de chômage, d’inflation, de restructuration de l’industrie et de nouvelles méthodes d’exploitation, elle est essentielle au système capitaliste en guerre et paix. Après une désorientation causée par la destruction de l’emploi dans les années 1980-90, les signes pointent vers une classe ouvrière qui commence à se retrouver dans une nouvelle composition de classe qui refuse l’acception de toutes anciennes conditions. Les travailleur.euse.s immigrant.e.s, les travailleur.euse.s du «gig economy» et les secteurs prolétarisés des classes laborieuses commencent déjà à riposter. Jusqu’à présent, ces signes sont épars et n’indiquent pas une réponse massive et systémique à la gravité de l’attaque dont nous avons souffert, mais au moins, ils existent.

Le temps file. Le système est sclérosé. La course au profit capitaliste est non seulement une menace pour l’existence de la planète à travers la destruction environnementale qu’elle engendre mais les solutions racistes des nationalistes menacent des guerres qui pourraient conduire en arrière l’humanité de siècles (si bien-sûr, celle-ci survit).

Les luttes contre l’exploitation, l’oppression et le racisme ne sont cependant qu’un début. Les grèves, les occupations et les manifestations peuvent construire la confiance, la solidarité et peuvent nous gagner des concessions des employeurs et des propriétaires. Ces luttes élémentaires ont cependant besoin d’une direction et d’un programme afin d’éviter une situation ou toute lutte est contrainte de recommencer à zéro à chaque fois. Ce Premier Mai, seulement quatre jours avant le 200e anniversaire de la naissance de Marx, souvenons-nous de ses mots : «toute lutte des classes est une lutte politique».

Alors que la classe ouvrière a besoin de ses propres organes pour centraliser ses luttes à travers un vaste territoire, une fonction occupée autrefois par les conseils ouvriers et les assemblées, elle a également besoin d’un parti international et internationaliste qui offre une vision politique à long terme et qui guide la lutte vers une direction communiste. Le Parti n’est pas la classe ou un gouvernement-en-devenir (comme le pensaient autrefois les sociaux-démocrates) mais un outil politique nécessaire pour unifier et guider le mouvement de notre émancipation qui émerge de la lutte des classes elle-même. C’est à ce parti que la Tendance Communiste Internationaliste à dédié ses efforts afin de lutter pour un monde sans classes ou États, sans exploitation ou frontières, sans famines ou guerres, ou la liberté de chacun est la condition pour la liberté de tous.

Tendance Communiste Internationaliste, Premier Mai 2018

Tuesday, May 1, 2018

Tuesday, May 1, 2018