Exposé et bilan de la réunion publique à Paris le 22/09/2023

Vendredi 22 septembre, la TCI a tenu une réunion publique à Paris devant environ 37 personnes. Étaient présents notamment les groupes politiques suivants : Robin Goodfellow, le Groupe International de la Gauche Communiste (GIGC), le Courant Communiste International (CCI), un membre de la CNT/AIT et des sympathisants. Le sujet portait sur la marche à la guerre et le rôle des révolutionnaires dans cette nouvelle situation politique. Des camarades britanniques, américains et italiens étaient présents pour souligner l'aspect international de notre réunion et la gravité de la situation politique présente. Nous publions, ici, l'exposé introductif à la discussion avant de donner notre conclusion politique de cette réunion.

Guerre impérialiste et/ou guerre de classe

Nous sommes encore aujourd’hui dans la plus longue récession connue par le capitalisme (après le plus long boom économique : les trente glorieuses) de son histoire. Cela a conduit à des contradictions incroyablement complexes dans tous les domaines, économiques, social, environnemental et même sanitaire.... Voilà ce que nous connaissons aujourd'hui.

1 – Qu'est ce qui a amené à la situation actuelle ?

Dans les années 60 – 70, le capitalisme a connu une vague incroyable de lutte de classe dans le monde entier (Est et Ouest confondus) La résistance ouvrière a ensuite conduit, accéléré et érodé les marges de manœuvre des capitalistes pour les concessions économiques. Elle a ensuite conduit partout à la rationalisation et à la restructuration de l'économie et de l’industrie. Après une attaque sans précédent contre la classe ouvrière avec les Reganomics et le thatchèrisme, les États capitalistes ont délocalisés leurs entreprises dans les pays où les salaires étaient très bas. Cette politique avec le développement de la mondialisation a permis pendant un temps de lutter contre la baisse du taux de profit.

Mais cette politique d'attaque des salaires et des avantages sociaux n'a eu qu'un temps. Elle n'est pas arrivée depuis le début des années 2000 à enrayer la baisse du taux de profit . Un nouveau cycle de production et d'accumulation s'avère impossible. Or, le capitalisme fait face aussi a plusieurs crises comme nous l'avons déjà signalé ci-dessus.

Après la crise financière de 2008, pour sauver le système, il ne restait plus qu'a mettre en place une politique d'argent facile. Les banques centrales au moyen du Quantitative Easing (QE) ou assouplissement quantitatif, tiennent alors sous morphine le capitalisme. Une fois de plus cette politique n'a eu qu'un temps. Il a fallu éponger les bulles financières qui pouvaient éclater à tout moment. Un faible taux d'inflation, au départ, avait pour but d'éponger une partie de cet argent. Mais la politique inflationniste lui a échappé et s'est avérée être incontrôlable. D'où une politique du resserrement du crédit mise en place à la fin de 1922 et encore actuellement. Le taux du crédit qui était à zéro et permettait de donner de l'oxygène au système en relaçant les affaires, est remplacé par une nouvelle politique de resserrement du crédit ce qui pourrait entraîner une grave récession. Le taux de la FED est passé en août à 5,25. La BCE l'a porté à 4,5%, un record depuis le printemps 2001.

Or, nous constatons, avec le resserrement du crédit, des faillites et une crise de l'immobilier dans plusieurs pays (Chine, USA, Grande Bretagne et bientôt en France). En Allemagne, on note des faillites en série de grands magasins ; ailleurs c'est l'envolée des taux américains, la crise immobilière chinoise… Le Monde du 28 août écrit « Depuis quelques semaines, les signes inquiétants pour la santé de l’économie mondiale se multiplient. » « Les défaillances d’entreprises augmentent partout ; elles ont déjà dépassé leur niveau de 2019 au Royaume-Uni, au Canada ou encore en Suède. »

Quelques chiffres :

A/ Chine

Cette année, le Fonds monétaire international prévoit une croissance de 3,2 % pour la Chine, le taux le plus bas en quatre décennies, loin des 5,5 % de l’objectif officiel. Mais globalement la situation de la Chine inquiète les capitalistes. Elle va à contre sens, elle se trouve face à un déflation potentielle c'est à dire sans inflation. Ainsi les prix à la consommation sont restés stables en juin sur un an, tandis que les prix à la production ont continué de plonger, le reflet d'une demande atone qui complique un peu plus la reprise, selon des chiffres officiels publiés lundi 10 juillet. Ces chiffres alimentent les craintes d'une déflation - un recul des prix à la consommation - dans la deuxième économie mondiale.

B/ En Europe

C'est la stagnation économique, doublée d’une inflation persistante. L’inflation progresse dans dix des vingt pays de la monnaie unique, dont la Belgique, l’Espagne, l’Irlande, le Portugal, l’Autriche, et l'Italie. L’augmentation est la plus forte en France, où elle passe de 5,1 % en juillet à 5,7 % en août (les statistiques harmonisées au niveau de l’Union européenne sont légèrement différentes de celles de l’Insee, qui situe l’inflation à 4,8 %). la croissance du PIB européen a été revue à la baisse pour le deuxième trimestre à 0, 1 % selon Eurostat du 7/9/22 après 0,1 au premier trimestre. Et parallèlement la croissance allemande se situe à 0% première économie européenne. Cette stagnation économique, doublée d’une inflation persistante, complique la tâche de la BCE qui avait pour mandat de maintenir l’inflation à 2 % à moyen terme. !!

C/ Aux États-Unis :

L'on nous dit que la conjoncture économique serait solide. Nous savons que les données statistiques ne sont pas exactes et masquent la réalité et le chômage réel. Mais, le ralentissement du marché de l’emploi se confirme. En août, le nombre de créations d’emplois a été de 187 000, nettement au-dessous de la moyenne de ces douze derniers mois, qui était de 271 000, selon les données publiées, vendredi 1er septembre par le Bureau américain du travail. Les statistiques ont par ailleurs été révisées à la baisse pour les mois de juin et juillet, en recul de 110 000 emplois par rapport aux estimations initiales. Quant au chômage, il progresse assez nettement, passant de 3,5 % à 3,8 % entre juillet et août, retrouvant son plus haut niveau depuis début 2022.

Les capitalistes ne disent pas toute la vérité car il ne faut pas effrayer les bourses qui vivent sur la croyance que tout va aller mieux ; alors ils trichent, mais, au détour d'un article, on lit dans Le Monde que « Le commerce mondial est en récession (– 0,7 % au premier trimestre 2023). » Comment peut-on avoir un commerce en récession et une croissance économique ? Le PIB prend en compte aussi la consommation, or il faut tout de même acheter les denrées alimentaires.

D'où, la seule solution pour le capitalisme serait de retrouver un nouveau cycle de production. Mais cela fait plus de 50 ans qu'il essaie de le trouver, en vain. Seule la guerre en détruisant du capital vivant et mort pourrait permettre la mise en place de ce nouveau cycle. Nous en sommes là. Mais, de plus, le capitalisme se trouve face à de nombreux problèmes comme arrêter la prédation de la nature qui est déjà un mur incontournable. C'est donc face à cette inéluctabilité et la raréfaction des matières premières que la marche à la guerre se profile.

C'est pourquoi un nouveau cours vers la guerre impérialiste généralisée est ouvert. Dés lors, la guerre impérialiste devient maîtresse et oriente toute la situation internationale.

2 – Vers la guerre impérialiste.

De notre point de vue toutes les autres questions sont soumises à l'accroissement des tensions impérialistes.

A/ Reconstitution de blocs.

Le premier ministre chinois, Li Qiang a appelé à s’opposer à la confrontation de blocs : « il ne faut pas choisir de camp » a t-il mis en garde mercredi 6 septembre 2023. Il a aussi appelé à agir contre le risque d'«une nouvelle guerre froide», au cours du sommet en Indonésie devant la réunion des représentants des grandes puissances (la vice-présidente américaine Kamala Harris et le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov) et des dirigeants d'Asie du Sud-Est.

Le président indonésien Joko Widodo après le sommet a déclaré :"Je peux garantir que si nous ne sommes pas capables de gérer nos différends, nous serons détruits".

Les plus importantes problèmes et zones de conflits actuels sont l'Ukraine, Taiwan, la mer de Chine méridionale et l'armement de la Corée du nord comme l'a rappelé Kamala Harris. Elle a dénoncé au sommet "l'invasion illégale de l'Ukraine par la Russie", les défis sécuritaires en mer de Chine méridionale et la menace des missiles nord-coréens.

Bien évidemment le contour des blocs n'est pas encore fixé mais l'on en voit les principales composantes.

  • Les États-Unis ont réussi à resserrer et à élargir l'OTAN derrière eux puis à créer l’Aukus en Asie-Pacifique.
  • L'autre bloc autour de la Chine n'est pas encore définitivement soudé, pour l'instant la Chine cherche à solidifier le Sud Global et défendre ses intérêts en face du bloc occidental. Le groupe des BRICS s'est agrandi en intégrant l’Arabie Saoudite, les Émirats Arabes Unis, l’Iran, l’Égypte, l’Éthiopie et l’Argentine. Les Brics passent ainsi de cinq à onze membres, le groupe représentera 46 % de la population de la planète et un peu plus du tiers du produit intérieur brut mondial.
    La Chine sait bien que les intérêts des uns et des autres ne concordent pas avec les siens. Le seul véritable point commun est l’ambition de proposer un autre ordre international différent de celui dominé aujourd’hui par les économies les plus riches de la planète.
  • Un autre point commun porte sur comment détrôner le dollar roi, symbole de l’hégémonie occidentale. Ces derniers mois, les sanctions occidentales imposées à la Russie – le gel des réserves en dollars de la banque centrale, l'exclusion des banques russes du réseau international de communication interbancaire Swift, l'interdiction des importations de pétrole de Moscou… – ont relancé l’intérêt de nombreux pays émergents pour la « dédollarisation ».

Depuis le début de la guerre en Ukraine, les initiatives pour réduire l’usage du billet vert se multiplient. La Russie vend désormais ses hydrocarbures à Pékin en renminbis. En janvier, elle a connecté son système de messagerie interbancaire à celui de l’Iran, permettant aux banques des deux pays d’échanger de l’argent sans passer par Swift. Au printemps, la Chine, qui développe elle aussi un concurrent à Swift (le China International Payment System, CIPS), a acheté du GNL (gaz) aux Émirats arabes unis en yuans.

B/ D'autres signes existent qui sont plus insidieux :

Les Guerres commerciales se poursuivent et s'intensifient. Selon le FMI, 3000 nouvelles barrières commerciales et douanières ont été érigées en 2022 (soit trois fois plus qu'en 2019 ce qui représente une baisse de 7% du PIB mondial.

Les aides octroyées sous le prétexte de l'économie de transition verte sont très parlantes. L’Europe se dit prête à déterrer la hache de guerre contre les États-Unis, à cause des subventions américaines à la voiture électrique favorisant le « Made in USA ». Les deux partenaires et alliés sont-ils sur le point de relancer la guerre commerciale ? Bien évidemment, non. Mais cela est le signe de l'accroissement des tensions entre les États.

Quels sont les faits ?

Dans le cadre de la lutte contre l’inflation, Joe Biden a annoncé cet été un vaste plan d’aide avec une mesure particulièrement irritante pour les Européens. Il s'agit d'un crédit d'impôt, jusqu'à 7 500 dollars, pour l’achat d’une voiture électrique, à condition qu’elle sorte d’une usine américaine, batterie comprise. Donald Trump avait déjà déclaré la guerre commerciale à la Chine, puis à l’Europe avec la hausse des droits de douane. Et maintenant, Joe Biden prend une mesure destinée à soutenir son industrie en priorité.

Plus sérieusement les États-Unis mènent la guerre commerciale contre la Chine et notamment en poursuivant de façon méthodique une stratégie d’affaiblissement de la « tech » chinoise. En plein cœur de l’été, les États-Unis ont promulgué un «executive order» (décret) interdisant aux investisseurs américains, d’ici à 2024, de placer leurs dollars en Chine dans des secteurs clés comme certains pans de l’intelligence artificielle (IA), des ordinateurs quantiques ou encore des semi-conducteurs. C'est ce que certains appellent la « guerre de la tech ».

La France pousse l'UE à réagir contre l'invasion du marché européen contre les voiture électrique chinoise qui envahissent le marché. (L'Express du 13/09/2023).

Les matières premières sont au cœur des conflits. (Exemple du blé en Ukraine) Les matières premières (blé, terres rares, etc.) jouent un rôle très important car ce qui est enjeu, c'est la suprématie impérialiste pour la domination mondiale. Il est fondamental dans ce cadre de s'assurer le contrôle des zones riches en matières premières : (Exemple de l'Afrique).

Cette recherche des matières premières se poursuit aussi dans les océans et près des pôles où la conquête s'y développe. Les coups d’États militaires qui se succèdent en Afrique montrent que la situation devient intenable pour les pays les plus faibles et dont les richesses sont exploitées par leurs "parrains". Mais immédiatement, après avoir quitté un « parrain » impérialiste, la question de son changement se pose.

Economie de guerre partout dans le monde (nous renvoyons à notre article sur le développement de l'économie de guerre dans le monde et notamment en France avec la déclaration d'Emmanuel Macron sur le sujet).

Tensions généralisées dans le monde. L'Ukraine n'est que l'arbre qui cache la forêt, etc...

Les Nations unies comptent onze zones de conflits dans le monde : Myanmar, Haïti, République démocratique du Congo, La Corne de l’Afrique, Le Sahel, Afghanistan, Liban, Syrie, Yémen, Sud Soudan, Nigeria. Nous en compterions d'autres plus graves comme l'Ukraine, l'Arménie et l’Azerbaïdjan, l'Irak, la Chine et l'Inde, la Corée, Taïwan et la mer de chine....

3 – Au niveau social :

Chaque jour nous avons la confirmation de ce que nous avions déjà indiqué dans le numéro 22 de Bilan et Perspectives du premier semestre 2023 qui est consacré au renouveau des luttes ouvrières. Bien évidemment, le contenu des luttes est encore faible après 50 ans de reflux des luttes ouvrières. Par contre l'on constate un accroissement des grèves et des luttes dans le monde avec une énorme confusion parmi les ouvriers qui n'arrivent pas à se dégager du carcan syndical.

Nous ferrons grâce au lecteur de la litanie des luttes puisqu'elles se généralisent partout. Nous souhaitons donner une place particulière aux luttes du front : Russie et Ukraine car beaucoup nous disaient que nous faisions fausse route en les prédisant puis orientant une partie de notre action vers des Comités NWBCW.

A/ Dans le monde avant la guerre en Ukraine : une situation complexe et difficile du fait de la faiblesse de la classe ouvrière.

Jusqu'à ces derniers temps, c'était d'autres formes de luttes qui se profilaient partout, et plutôt à la périphérie des puissances impérialistes centrales c'est à dire dans les "usines du monde" (Chine, Vietnam, Indonésie, Inde, etc..) ou même ailleurs voire aussi en Syrie. On commence également à voir une montée en puissance des réactions en Russie et Ukraine.. Les réactions sont plus contre la situation économique (pas de salaires) que contre la guerre.

Au cœur du système, les luttes sont mêlées du fait des attaques se portant aussi contre la petite bourgeoisie et les couches moyennes en les prolétarisant. C'est là encore dans ces couches que le capital peut extraire de l'argent thésaurisé pour faire fonctionner les économies nationales et en leur arrachant les « bénéfices » dont elles jouissaient et en les employant en tant que force de travail à faible coût (la précarisation).

Mais les dernières luttes ouvrières, même si elles n'ont pas été victorieuses et si elles n'ont pas su dépasser le cadre syndical et l'encadrement de la bourgeoisie, ont montré que la classe ouvrière n'est pas satisfaite. Elle possède un gros potentiel de lutte et de mécontentement.

C'est dans la période qui s'ouvre que la situation risque de devenir plus ingérable pour la bourgeoisie mondiale. Comment continuer le chemin vers la guerre, re-développer l'armement et les stocks de munitions alors que les populations et les prolétaires sont de plus en plus étranglés par l'exploitation et la poursuite des attaques contre les mesures sociales alors que le terrain social n'est pas fiable et soumis.

B/ Depuis la guerre en Ukraine.

La lutte sociale devrait prendre un nouvelle direction du fait de la lutte contre l'austérité et les restrictions en vue d'un renforcement de l'économie de guerre ce qui veut dire : moins pour la vie, plus pour l'armée.

Ainsi hors du terrain d'affrontement, Ukraine/Russie, les efforts demandés pour l'économie de guerre dans une période d'attaque du niveau de vie, s'avérera de plus en plus délicate pour la bourgeoisie.

Sur le front :

En Ukraine : Déjà, la longue contre-offensive infructueuse et l'augmentation rapide du coût de la vie entraînent une recrudescence des manifestations ouvrières dans tout le pays.

Les faits.

  • L’État souhaite supprimer la troisième zone d'impact de la radioactivité et les garanties sociales pour les victimes de la catastrophe de Tchernobyl (en particulier les pensions préférentielles, les repas gratuits pour les enfants dans les écoles et d'autres paiements). Immédiatement, le 4 juillet, devant la mairie d'Ovruch, dans la région de Zhytomyr, les habitants manifestent.
  • Grève à la mine de Novokostyantynivska, dans la région de Kirovograd, qui extrait du minerai d'uranium. Il s'agit du plus grand centre d'extraction d'uranium en Europe. Depuis le 17 juillet, les travailleurs de la mine refusent de descendre sous terre. La mine emploie près de 650 personnes, dont 200 sont mobilisées dans l'armée.
  • Le 15 juillet, le personnel médical de plusieurs hôpitaux publics s'est rendu en manifestation au conseil municipal de Krivoy Rog (Kryvyi Rih) aux cris de « Nos salaires ! nos salaires ! ». Depuis deux mois sans salaire puis ils n'avaient reçu qu'un acompte pour le mois de mai, et les paiements se sont arrêtés là. Le 22 juillet, nouveau rassemblement a eu lieu. Une infirmière du service neurologique du 11e hôpital raconte qu'en plus des retards constants de salaires, le personnel a été considérablement réduit.
  • Un technicien de la principale entreprise de construction de Kharkiv, Zhytlobud-1, témoigne: « Les vacances n'ont pas été payées, le salaire a été divisé par deux ».
  • Et sur le front : A Bakhmut, par exemple, le 25 juin au sein de la 31e brigade d'assaut. Après l'offensive – les soldats ont reçu une telle riposte qu'ils ont reculé plus loin qu'avant l'offensive. Le lendemain, les colonels sont arrivés avec des menaces. Mais, deux bataillons ont refusé de se battre. Ils n'ont pas nourri les récalcitrants et ils ont menacé de les emprisonner. Trois bataillons ont déposé les armes, parce qu'ils ont été conduits à l'abattoir sans soutien. 30 personnes ont été immédiatement fusillés. Ils ont nommé un nouveau commandant, mais c'est la même chose. Il n'y a toujours pas de nourriture, seulement une ration sèche. Si on les menace de les emprisonner, ils répondent : « emprisonnez nous, et qui tiendra nos positions ? ». Maintenant, ils continuent à se battre d'une certaine manière, mais sur place. (information confirmée par Der Spiegel).

Le nombre de condamnations pour évasion de la mobilisation en vertu de l'article 336 du code pénal continue d'augmenter, bien que moins rapidement qu'au début de l'année. [pour l'Ukraine, on parle de 200 000 transfuges].

En Ukraine comme en Russie plus longtemps la guerre durera, plus l'on verra de nombreuses luttes sociales se développer pour le salaire. Grève pour le salaire non payé en Ukraine et Russie.

En Russie il en est de même.

  • Il existe plusieurs prisons. L'année dernière, environ 300 mobilisés russes qui refusaient de combattre en Ukraine ont été détenus dans le sous-sol de Zaitsevo dans l'Oblast de Luhansk. Ils y ont été menacés, n'ont pas été nourris, ont été traités de "porcs", n'ont pas été autorisés à aller aux toilettes, n'ont pas été autorisés à se laver et n'ont pas reçu de soins médicaux. Nous avons également connaissance de faits de torture.
  • Le 17 mai, des informations ont filtré concernant une grève et des manifestations de plusieurs dizaines de travailleurs de l'usine UAZ-automobiles d'Oulianovsk. Les ouvriers se sont rassemblés pour une manifestation dans les ateliers et se sont plaints des bas salaires, selon la chaîne Baza Telegram, qui a publié une vidéo tournée à l'intérieur.
  • Mais les choses les plus chaudes se sont produites près de la ligne de front le 24 mai. 39 ex-prisonniers se sont évadés du camp d'entraînement "Storm Z" à Lisichansk (dans la soi-disant "République populaire de Lougansk"). Les forces de l'ordre de la région de Rostov ont reçu un avis de recherche qui donnait une description des déserteurs.
  • Le 27 mai, on a également appris l'évasion de 7 ex-prisonniers armés d'une unité militaire russe près de Soledar dans la région de Donetsk.
  • La 155ème brigade du corps des marines, depuis le début de la guerre, environ 220 militaires ont refusé de participer aux opérations de guerre, comme l'indique le résumé opérationnel de l'état-major ukrainien du 22 mars.

Plus généralement, il faut lire l'article du monde qui soulève un coin du voile des réactions en Russie dans l'armée et dans le pays (1).

C/ Ailleurs un peu partout dans le monde, se développent des luttes notamment pour le niveau de vie.

Les États-Unis, le Royaume-Uni et l'Allemagne ont connu de fort mouvement de grève ; la bourgeoisie se trouve contrainte de prendre des mesures encore plus restrictives contre le droit de grève. Aux USA, il est question d'une loi contre le ralentissement du travail dans les ports et de le considérer comme une « pratique de travail déloyale ». Il en va de même au Royaume-Uni puisqu'il s'agit d'instaurer un service minimum dans de nombreux services publics. Au moment où nous écrivons, une nouvelle grève inédite dans le domaine de l'automobile les « Big three » est en préparation aux États-Unis. « C’est la grève susceptible de changer le visage de l’Amérique. Pour ses défenseurs, elle pourrait permettre de rompre avec quarante ans de stagnation salariale (le salaire médian réel a augmenté de 9 % depuis 1979, selon la Réserve fédérale de Saint Louis) et le déclin inexorable des syndicats depuis que Ronald Reagan a licencié plus de onze mille aiguilleurs du ciel, en 1981. Pour ses détracteurs, elle pourrait marquer un retour aux années 1970. »

En Allemagne les grèves pour de meilleurs salaires se multiplient. Selon Karl Brenke, expert de l'institut DIW, « il y a eu plus de grèves ces dix dernières années que dans les décennies précédentes ». Et depuis, les cheminots et les employés des aéroports ont débrayés au printemps. Une grève illimitée était envisagée à la Deutsche BAHN qui a abouti a un accord prévoyant une augmentation des salaires de 410 euros par mois: 200 euros versés à compter de décembre 2023, auxquels s'ajouteront 210 euros à partir d'août 2024. Les cheminots recevront en outre une prime défiscalisée de 2.850 euros versée avec le salaire d'octobre.

Et en Chine ?

Les manifestations et les grèves dans les usines chinoises sont en forte hausse, selon le site d’observation des mouvements sociaux, China Labour Bulletin (CLB). Au cours du premier trimestre de l’année 2023, le site a comptabilisé 108 mouvements de protestation, dix fois plus qu’au dernier trimestre 2022, et deux fois plus que pendant toute l’année 2022.

Ces manifestations sont concentrées dans l’industrie d’exportation, en premier lieu l’électronique, suivie du vêtement, du jouet et de l’automobile, précise le site établi à Hong Kong.

En Syrie dernièrement malgré la répression féroce des dernières années, les manifestations reprennent dans le sud du pays avec une grande ampleur contre la hausse vertigineuse du niveau de vie. Et même au Kenya en juillet !

4 – NWBCW

Nous arrivons maintenant aux conséquences pratiques et militantes de la situation politiques que nous venons de décrire.

La TCI a eu raison de défendre le développement de Comités NWBCW. Bien évidemment leur réussite n'est pas immédiate, beaucoup sont morts nés. Nous ne sommes, ni immédiatistes, ni dupes des difficultés que nous devions rencontrer. Il s'agit d'une orientation à long terme qui se vérifiera contre la marche à la guerre. Les réactions en Ukraine et en Russie indiquent déjà la voie que les luttes emprunterons. D'autres internationalistes qui n'ont pas souhaité travailler concrètement avec nous, agissent également en ce sens comme certains anarchistes de la CNT-AIT ou Assembleia, etc... Ainsi, de plus en plus notre politique contre la guerre devient et deviendra fondamentale et nous devrons lier les luttes immédiates des ouvriers pour le niveau de vie et la lutte contre la guerre impérialiste.

Plus la guerre va s'intensifier, plus elle se transformera en guerre de classe.

Quelques commentaires suite à la réunion.

Nous avons pu réaffirmer le changement de situation politique sur plusieurs points fondamentaux : la marche à la guerre et les réactions ouvrières encore faibles mais bien réelles. Nous avons pu réaffirmer la nécessité des Comités contre la guerre mais pour la guerre de classe. Et surtout notre appel à tous les révolutionnaires et internationalistes, sans exclusive, à travailler ensemble pour renforcer l'intervention politique dans la période qui s'ouvre.

Un camarade de la CNT/AIT nous a indiqué ce que son organisation faisait de façon pratique pour aider les déserteurs des deux camps. Cela nous a permis d'insister sur le soutien que nous apportons à ce genre d'action tout en précisant qu'il fallait surtout aider ces camarades déserteurs à trouver, à plus long terme, de meilleurs interlocuteurs et certainement plus efficaces que nous pour ce genre d'action (rappel des RKD qui utilisaient les Quakers pour aider les déserteurs allemands pendant la 2ème guerre mondiale).

Les camarades américains, britanniques (cf ci-après son intervention) et italiens de la TCI ont fait une relation des luttes ouvrières dans leur pays ce qui a donné beaucoup de chair à nos interventions politiques concrètes ce qui a été salué par un participant car leurs interventions ont été faites en français. Devant des interrogations de certains camarades dans la salle demandant pourquoi les internationalistes appartenant à la Gauche communiste ne travaillaient pas tous ensemble ce qui permettrait une plus grande force, la TCI a réaffirmé que les Comités étaient ouverts à tous les camarades révolutionnaires et internationalistes. Personne n'est écarté des Comités puisque tous les internationalistes militant pour la révolution y sont les bienvenus. Cependant, notre intervention politique dans ce domaine a un caractère pratique par la diffusion de tracts, de réunions publiques communes, de soutien aux militants internationalistes en difficulté comme des déserteurs et peut être demain des camarades emprisonnés par leurs propres bourgeoisie, etc... Ainsi, nous ne souhaitons pas uniquement faire de déclarations platoniques contre la guerre comme d'autres groupes révolutionnaires l'ont fait. En soi, ce n'est pas faux mais nettement insuffisant.

Malheureusement, la réunion qui aurait pu beaucoup plus approfondir tous les aspects de la situation actuelle et ses conséquences pratiques, a été quelque peu détournée de son but par des camarades du CCI (voir ci-dessous) qui n'ont pas souhaité défendre leur position politique actuelle sur la marche à la guerre par rapport à notre présentation ce qu'un jeune camarade a fortement regretté. Ces camarades ont tenté de dévier la discussion sur la question syndicale et des questions montées en épingles qui datent de plus de 20 ans. Nous ne souhaitions pas polémiquer trop sur ces sujets au cours de réunions publiques et nous ne le ferons pas également ici.

Cependant, la discussion était si faussement partie sur la question syndicale qu'il a même fallu que le militant de la CNT/AIT présent note clairement que les propos du camarade de la TCI avait été complètement déformés puisqu'il se trouvait en accord politiquement avec lui et que la discussion n'avait pas lieu d'être sur ce terrain. Un autre participant ne comprenait pas la tension qu'il ressentait chez certains durant la réunion. De notre côté, il n'y avait aucune animosité, nous souhaitions uniquement une discussion politique et même, la plus profonde possible, un point c'est tout. Toutefois, nous ne voulions pas remettre sur le tapis de vieilles lunes de plus de vingt ans que ces camarades ne cessent sempiternellement de nous renvoyer à la face. Voilà comment dégoûter tous les jeunes sympathisants de venir discuter avec les membres de la Gauche communiste !

Tous ces dérapages montrent que ces camarades très idéalistes par manque de concret et vivant dans le passé, ne comprennent pas la gravité de la situation politique. Nous les appelons à se ressaisir pour traiter des questions fondamentales et actuelles auxquelles l'Humanité mais aussi la classe ouvrière, se confrontent. Nous avons autre chose à faire et autrement plus sérieux.

En ce qui nous concerne, nous avons pu défendre et développer notre position politique. C'était l'essentiel et nous l'avons fait. Peut être ces camarades défendront-ils maintenant dans leurs futurs journaux leur vision politique en laissant de côté les histoires anciennes, peu politiques, qui sont amplement dépassées ?

Pour souligner le manque de sérieux d'une de ces idéalistes, nous tenons à rappeler son intervention surréaliste et très haute en couleur, nous accusant, en répétant plus de dix fois la même phrase, que nous aurions renié la lutte de la classe ouvrière. Comprenne qui pourra !

M.O.
Groupe révolutionnaire internationaliste
25/09/23

Intervention du camarade de la CWO

Les accusations portées par le CCI ne méritent aucune réponse. Face aux nombreuses crises du capitalisme, la classe ouvrière est le dernier espoir de l’humanité. Mais partout, la classe ouvrière ne se trouve pas dans les meilleures conditions. Lors de la dernière vague de grèves en Grande-Bretagne, nos camarades se sont rejoints à des piquets de grève et des rassemblements dans de nombreuses villes (Cardiff, Londres, Guildford, Leicester, Liverpool Manchester, Lincoln, Newcastle Glasgow et autres). En discutant avec les travailleurs, ces derniers ont expliqué qu'ils n'avaient aucun espoir réel d'obtenir une augmentation de salaire correspondant à l'inflation. Les syndicats étaient encore bien présents et pas sous la pression de la classe ouvrière. Ce n’est pas une surprise. Après des décennies de recul, il faudra du temps à la classe ouvrière pour retrouver son chemin. Le problème est que les ouvriers depuis des décennies de revers ne sont pas prêts de lutter et/ou sont trop timides par crainte de perdre le peu qu'ils ont acquis. Dans ces conditions, il est très facile pour les syndicats de sembler être combatifs tout en sabotant la lutte revendicative. Et nous ne parlons pas ici d'une lutte plus consciente. En bref le problème actuellement n'est pas principalement les syndicats mais le niveau de militance de la classe ouvrière.

Toute notre politique depuis le commencement de la guerre en Ukraine se base sur la reconnaissance que cette guerre ouvre un nouveau tournant dans l'histoire impérialiste. Et ce nouveau tournant a besoin d'une nouvelle réponse des révolutionnaires et de la Gauche communiste. Nous devons abandonner les polémiques inutiles et sectaires du passé dans lesquelles chaque groupe essayait de prouver qu’il était meilleur que tous les autres. Aujourd'hui, la situation est trop grave et dangereuse pour ce petit jeu.

Si nous voulons faire partie d’un mouvement de classe réellement capable de répondre à la barbarie capitaliste, nous devons changer d’orientation. Nous devons nous concentrer sur ce que nous sommes d’accord en tant qu’internationalistes si nous voulons donner une direction aux inévitables luttes à venir. Nous avons donc décidé de ne pas répondre aux vaines polémiques et provocations ou critique autres que l'action nécessaire des internationalistes. Notre combat est contre les impérialistes et ceux qui voudraient défendre la gauche pour tel ou tel projet impérialiste. C'est la base de notre soutien aux comités NWBCW.

Les comités doivent montrer le chemin du lien entre la lutte économique et la lutte politique, mais ils ne pourront réussir que lorsque la classe au sens large commencera à y adhérer. Certains se forment à travers le monde (Corée du sud, Turquie, Canada et aux Etats-unis), mais pour l'instant la plupart sont l'œuvre de militants politiques (bien que celui de Glasgow ait été formé dans un quartier ouvrier avec la participation d'une partie de la communauté locale). Si les travailleurs ne les font pas siennes, ils resteront vides ? C’est un début et ils constituent une forme très concrète d’internationalisme qui va au-delà de simples déclarations d'intention.

Notes :

(1) lemonde.fr.

Saturday, October 7, 2023