L’écologie sociale : nouvelle expression du radicalisme petit-bourgeois

La question de l’écologie est devenue omniprésente. La destruction de l’environnement et les menaces qu’elle fait peser sur l’humanité sont devenues incontestables : le réchauffement climatique et ses conséquences, la chute de la biodiversité, la raréfaction de l’eau douce, l’acidification des océans, la déforestation... Il en résulte un sentiment d’urgence, de fin du monde. Ce « catastrophisme(1)» a tendance à susciter fatalisme et passivité. Il est aussi propice aux mystifications. Les gouvernements et les industriels font croire qu’ils ont pris les choses en mains (ne sommes-nous pas déjà en transition écologique ?), alors que "leur solution" consiste en un mélange de culpabilisation individuelle et de promesse d’innovations technologiques, tout cela afin de poursuivre leur course au profit, suivant le vieil adage "après moi le déluge". Dans ce contexte, émerge malgré tout une critique du mode de production capitaliste de plus en plus axée sur l’écologie. Ainsi, ces dernières années, à travers différents écrits, divers auteurs, émanant essentiellement du milieu universitaire, s’affirment anticapitalistes, tout du moins sur le papier, et montrent en quoi la logique du capital est incompatible avec la préservation de notre milieu naturel. Des courants associant question sociale et question écologique se sont aussi développés, les plus influents étant l’écosocialisme, que nous avons déjà critiqué par ailleurs(2) et l’écologie sociale. Cette dernière a le vent en poupe et reflète assez bien l’idéologie parcourant les mouvements sociaux actuels (démocratisme, activisme, interclassisme …), c’est pourquoi elle mérite que l’on s’y attarde un peu.

Bookchin et l’écologie sociale

L’écologie sociale est issu principalement des travaux de Murray Bookchin au cours des années 60(3). Cet anarchiste américain est resté relativement méconnu en France jusqu’il y a peu et il fait partie des précurseurs de l’écologie politique. Nos divergences avec lui ne portent pas sur le constat, la rupture de l’équilibre entre l’humanité et son milieu naturel, mais sur son analyse et les méthodes qu’il préconise pour détruire cette société. Pour Bookchin, la crise écologique trouve son origine dans la domination de l’humain par l’humain et la hiérarchie qui en découle.

(…) l’idée même de dominer la nature découle de la domination de l’humain par l’humain, que ce soit des femmes par les hommes, des jeunes par leurs aînés, d’un groupe ethnique par un autre, de la société par l’État, de l’individu par la bureaucratie, aussi bien que d’une classe économique par une autre ou d’un peuple colonisé par une puissance coloniale. (…) Sauf à changer les rapports les plus élémentaires de la société – notamment entre hommes et femmes, adultes et enfants, Blancs et autres groupes ethniques, hétérosexuel(le)s et (de fait, la liste est considérable) - la société sera minée par la domination, et cela même si elle revêt une forme socialiste, « sans classe » et « sans exploitation ». (…) Aussi longtemps que persistera la hiérarchie, aussi longtemps que la domination imposera un système d’organisation élitiste à l’humanité, le projet de dominer la nature se perpétuera et conduira inévitablement notre planète vers l’extinction écologique.(4)

Le désastre écologique actuel ne peut être imputé au seul capitalisme, selon lui. Il est vrai que les destructions environnementales n’ont pas démarré avec le mode de production capitaliste, toutefois elles n’ont jamais eu l’ampleur qu’elles ont aujourd’hui, au point de menacer la survie de l’humanité. L’intervention humaine dans la nature, guidée uniquement par la recherche du profit et de l’accumulation illimitée en est la cause.

Bookchin reste assez flou sur les origines de la domination, mais plus encore il semble ne pas tenir compte du processus historique et de ses implications. Toute l’activité humaine depuis les sociétés primitives a consisté à sortir de l’état naturel et à lutter contre la pénurie. Les sociétés de classe successives, malgré toutes les horreurs qu’elles ont engendrées, ont développé les forces productives jusqu’à fournir les conditions matérielles nécessaires à une société communiste, laquelle constitue l’aboutissement de cette évolution historique, marquant "la fin de la préhistoire de l’humanité". Le communisme n’est pas une belle idée ayant germé dans les cerveaux de bonnes âmes et possible à tout moment, il est né de l’expérience historique de la lutte de classe et de la réflexion des militants les plus conscients à son sujet.

Ainsi, pour nous, il est absurde d’envisager une autre société que la société capitaliste, qui soit sans classe et sans exploitation mais conservant des formes de domination et poursuivant la dévastation de l’environnement. La société capitaliste sera la dernière société de classe de l’histoire ou la dernière société si la révolution communiste n’a pas lieu. Bien sûr, toute la pourriture héritée de siècles d’oppression et d’exploitation ne disparaîtra pas du jour au lendemain, mais seule la révolution communiste peut y mettre fin en transformant les rapports de production, supprimant ainsi l’exploitation et détruisant les bases matérielles de toutes les formes d’oppression. Le changement de mentalité qu’appelle de ses vœux Bookchin viendra de là. Le communisme sera une société fondée sur l’association et la solidarité. Il engendrera la fin des séparations, c’est à dire la réunification de l’espèce et le rétablissement de l’équilibre entre elle et son milieu naturel.

Bookchin considère également que la crise écologique est le principal problème auquel est confronté l’humanité aujourd’hui et que cela constitue une situation nouvelle, nécessitant une nouvelle approche.

Selon lui, notre époque se caractérise par « l’apparition de questions totalement nouvelles (qui) transcendent les classes et (qui) concernent l’environnement, la croissance, les transports, la détérioration de la culture et la qualité de la vie urbaine en général » , il ajoute « d’autres questions sont également transversales par rapport aux intérêts conflictuels de classe, comme les dangers de guerre thermonucléaire, l’autoritarisme étatique croissant et finalement la possibilité d’un effondrement écologique de la planète » et il en conclut que « l’émergence d’un intérêt social général par-delà les vieux intérêts particularistes démontre qu’une nouvelle politique pourrait facilement prendre corps, et qu’elle viserait non seulement à reconstruire le paysage politique au niveau municipal mais aussi le paysage économique. »(5)

La méthode consistant à prétexter une situation nouvelle pour liquider le programme révolutionnaire et les leçons tirées des expériences historiques précédentes n’est pas nouvelle. Le raisonnement ici est simple : puisque les ravages environnementaux concernent tout le monde, luttons tous ensemble, par-delà les classes. Et voilà comment on justifie l’interclassisme ou un nouveau frontisme, écologique cette-fois. Effectivement, l’humanité entière est concernée et elle a intérêt au final au communisme. Pour autant, il est évident que le prolétariat, avec de grandes différences également au sein de celui-ci, est beaucoup plus impacté par la crise écologique, que ce soit par ses conditions de travail, de logement, d’accès aux soins, à l’eau, à la nourriture de qualité etc que la bourgeoisie. Si nous nous opposons à tout frontisme, ce n’est pas parce que nous croyons aux luttes « pures » mais, et l’expérience historique l’a confirmé, parce que toute alliance avec la bourgeoisie conduit nécessairement à l’échec. D’autres classes, que la bourgeoisie et le prolétariat, exercent une force sociale, c’est un fait mais seul le prolétariat en acquérant son indépendance de classe et en poursuivant ses propres intérêts pourra en finir avec le mode de production capitaliste qui se nourrit de son exploitation. Que des membres de la petite bourgeoisie ou même de la bourgeoise rejoignent le combat révolutionnaire, n’est pas nouveau mais cela implique qu’ils adoptent son programme.

Bookchin est aussi partisan de l’instauration progressive de contre-pouvoir parallèle, s’établissant au niveau de la commune formant « un réseau confédéral capable d’endiguer, et espérons-le, de renverser la tendance à une centralisation croissante de l’État et des grandes entreprises. » Des assemblées populaires sont censées se constituer au niveau de chaque commune ou quartier et grandir. Comment elles feront face à l’État, nous n’en savons rien. Les tenants de l’écologie sociale prétendent donc construire une nouvelle société parallèle, localement, sans s’occuper de l’État. Comme si des îlots socialistes pouvaient émerger par ci par là, se multiplier jusqu’à être suffisamment nombreux pour supplanter l’État ! On retrouve ici l’illusion d’une transformation progressive de la société, sans affrontement avec la classe dominante, ni insurrection ni prise de pouvoir politique, une sorte de gradualisme communaliste. Or, comme l’a écrit la Fraction italienne(6) au sujet de la guerre d’Espagne,

l’expérience historique a démontré qu’il ne peut être question de collectivisation, de contrôle ouvrier, de révolution socialiste avant l’abolition du pouvoir politique de la bourgeoisie.

Des anarchistes comme Vernon Richards ou Camillo Berneri sont arrivés aux mêmes conclusions.

Le recours à la démocratie directe est centrale dans la stratégie d’instauration de contre-pouvoir. La démocratie représentative est conçue comme une forme dévoyée de démocratie, la démocratie directe avec ses mandats impératifs et ses délégués révocables constitue la vraie démocratie. Elle apparaît comme un bien en soi et un idéal indépassable.

Cette conviction est extrêmement forte aujourd’hui. Puisque le peuple est majoritaire et que la démocratie est la victoire de la majorité sur une minorité, il suffit de garantir les conditions d’une vraie démocratie pour que le peuple puisse prendre les décisions conformes à ses intérêts et transformer la société. Singer le parlementarisme bourgeois à tous les niveaux de la société est censé permettre de rompre avec le capital et ses mécanismes. Or, la rupture avec le capitalisme ne sera jamais une question de choix, a fortiori de la majorité.

Les apologistes de la démocratie directe font totalement abstraction de l’hétérogénéité du peuple (le prolétariat lui-même au moment de la révolution ne formera pas une classe homogène) et de l’influence de l’idéologie bourgeoise, mais surtout ils oublient complètement le contenu. Pourtant comme l’écrit Bordiga(7) :

La révolution est (au contraire) un problème de contenu, un problème de mouvement et d’action des forces révolutionnaires dans un processus incessant, que l’on ne peut théoriser en le figeant dans les diverses tentatives de “doctrine constitutionnelle” immuable.

Comme la démocratie représentative, la démocratie directe génère la passivité et une séparation entre le discours et l’action. Elle peut même en être un frein. La démocratie fait partie du monde du capital. Elle constitue une forme de prise de décision transitoire à laquelle nous pouvons avoir recours, faute de mieux pour le moment, mais pas un principe intangible. D’autres procédures de décisions collectives sont à imaginer.

L’expérience du confédéralisme démocratique au Rojava ayant beaucoup contribué à populariser l’écologie sociale, il nous semble opportun de revenir rapidement sur celle-ci.

Le Rojava : une révolution sociale inexistante

L’histoire est désormais connue. Au début des années 2000, le chef historique du PKK, Abdullah Öcalan, a troqué le marxisme-léninisme pour le confédéralisme démocratique après avoir lu les écrits de Bookchin et échangé avec lui alors qu’il était en prison. Par la suite, le PKK s’est transformé en mouvement démocratique, écologiste et féministe.

Le Rojava, dénommé aujourd’hui Administration autonome du nord et de l'est de la Syrie (AANES), a vu le jour en juillet 2012 suite au retrait programmé des forces armées syriennes. Depuis, dans cette région autonome, se déroule une révolution sociale multiethnique, féministe et auto-organisée, à en croire ses soutiens de gauche et d’extrême gauche occidentaux.

Qu’en est-il exactement ?

Soyons clairs, il n’y a pas de révolution sociale au Rojava. En affirmant, cela nous ne minimisons pas la force et le courage des prolétaires qui s’auto-organisent pour survivre dans un contexte extrêmement difficile, profitant des espaces laissés (volontairement) par le pouvoir, mais les pratiques de démocratie directe et de coopération au niveau local ne sauraient cacher l’existence d’un État, même s’il n’en a pas le nom, et de rapports sociaux capitalistes.

Le Contrat social de l’AANES est conforme à toute constitution démocratique et en aucun cas révolutionnaire, comme l’écrivent justement Gilles Dauvé et Tristan Léoni(8), seul le relativisme culturel peut expliquer que certains s’extasient devant lui.

Le changement d’idéologie du PKK est purement stratégique. Après l’effondrement de l’URSS, principal soutien des mouvements de libération nationale, le marxisme-léninisme n’apparaissait plus comme l’idéologie adéquat pour le nationalisme kurde. En adoptant le confédéralisme démocratique, il s’agissait avant tout de changer d’image vis à vis de l’Occident, mais pas d’objectif. Le PYD9 défend toujours le nationalisme. Le chef du PYD, Salih Muslim, a ainsi déjà menacé d’expulser les arabes des régions kurdes et des chrétiens assyriens se sont plaints d’évacuations forcées. Le véritable pouvoir politique et militaire est entre les mains du PYD/PKK, celui des communes est largement limité à des questions locales ou à des fonctions consultatives.

La réalité du Rojava(10) est loin du portrait idyllique dressé par ses laudateurs. Des manifestations contre la conscription (imposée dès 2014), l’inflation ou les discriminations envers les arabes, la transformation des programmes scolaires (insistant sur l’histoire kurde) ont été sévèrement réprimées, les Assayish (la police) n’hésitant pas à tirer sur les manifestants(11).

Quant à l’écologie, s’il existe bien différents projets, tout cela reste dans le cadre de l’économie capitaliste. De plus, le Rojava se situe au centre d’une région riche en pétrole et d’une zone de conflits. Les prétentions écologiques sont avant tout de la communication.

En conclusion, malgré des apparences progressistes, le PYD au pouvoir au Rojava reste une organisation bourgeoise, toute révolution sociale devra se faire contre elle et l’AANES.

Deux exemples : PEPS et l’Offensive

Deux organisations s’inspirant des idées de Bookchin et de l’expérience au Rojava, sont apparues en France ces dernières années : Pour une écologie populaire et sociale (PEPS) et l’Offensive(12). Elles reprennent à leur compte l’essentiel des conceptions de Bookchin : la démocratie directe, la stratégie du double ou contre-pouvoir et l’interclassisme. Celui-ci est d’ailleurs parfaitement assumé puisque PEPS revendique la création d’un Front populaire écologique rassemblant « les classes moyennes à capital culturel aisé et les classes populaires dans les zones ultrapériphériques, rurales et les quartiers populaires ».

Ces groupes manifestent la volonté d’agir concrètement dès maintenant et se veulent pragmatiques. Ainsi ils sont à la fois favorables à la participation aux élections municipales et à la multiplication des ZAD et ne rechignent pas à participer à des actions potentiellement violentes comme à Ste Soline par exemple. L’« urgence climatique et social » et la construction progressive de la nouvelle société justifient l’activisme. Des luttes contre des projets inutiles ou climaticides, aux luttes antifascistes, au mouvement contre les retraites ou contre les violences policières, elles se doivent d’être présentes.

Toutes les deux cherchent à rassembler le plus de monde possible autour d’une charte qui ne contient pas de positions de classe mais plutôt un ensemble de valeurs « morales » (démocratisme, féminisme, multiculturalisme, antifascisme, écologie…) qui correspondent au final à l’image que la petite-bourgeoisie a d’elle-même.

Elles ont beau se revendiquer internationalistes, elles ont pris partie pour la défense de l’Ukraine dans le conflit avec la Russie. PEPS a publié de nombreuses déclarations de soutien au peuple Ukrainien et à la résistance ukrainienne, tandis que l’Offensive a collecté de l’argent en soutien à Solidarity collectives qui réunit des fonds pour fournir du matériel militaire aux soldats ukrainiens dits anti-autoritaires, entretenant le mythe d’une résistance autonome en Ukraine. Populaire, autonome, anti-autoritaire, qu’importe le qualificatif du moment que les prolétaires acceptent de crever pour des intérêts bourgeois !

Elles prétendent aussi par leur ouverture et leur pragmatisme être en rupture avec les méthodes passées. Pourtant, un rapide coup d’œil suffit à s’apercevoir qu’il s’agit des théories anarchistes et syndicalistes-révolutionnaires resucées, l’écologie se substituant au discours de classe. Au final, ces groupes aspirent à une gestion démocratique du capital mêlant planification écologique et respect des identités (de genre, ethniques etc). Leur activisme et leur phraséologie vaguement radicale masquent à peine le réformisme.

Mouvement communiste et destruction de l’environnement

Comment se positionnent les communistes ?

Lorsqu’on évoque l’écologie et les communistes (marxistes), une certaine suspicion apparaît, au mieux on considère qu’ils n’ont pas grand-chose à dire sur la question, le plus souvent on les accuse d’être de fervents défenseurs du productivisme et de l’industrialisation, quand on ne leur impute pas les dégâts infligés par les expériences du « socialisme réel ». Avouons le, nous trouvons ce débat ridicule.

Marx n’était pas écologiste et nous ne le sommes pas non plus. L’écologie politique est pour l’essentiel une réaction de la petite bourgeoise voire d’une fraction de la bourgeoisie face aux conséquences désastreuses du capitalisme dont elles n’avaient que faire tant qu’elles n’étaient pas concernées ou ne se sentaient pas menacées. Faut-il en déduire que les marxistes se fichent de la destruction de la nature ? Pas du tout. Marx et Engels ont analysé à leur époque, en fonction des connaissances disponibles, les risques que faisaient courir la logique du capital à l’homme et la nature. On ne saurait leur reprocher de ne pas avoir anticipé l’étendue du désastre des décennies avant que les premiers signes surgissent. Nous devons ajouter que quand bien même, Marx aurait sous-estimé la question, cela n’invalide en rien la théorie marxiste. Marx n’est pas un prophète, ses écrits ne sont pas sacrés. Il a reconnu lui-même s’être trompé à plusieurs reprises et il est revenu sur ses erreurs. Notre classe tâtonne et continuera à le faire jusqu’à son émancipation complète. Les révolutionnaires s’efforcent de tirer les leçons de l’expérience historique et approfondissent leurs analyses. Le marxisme est une théorie vivante, ce qui ne veut pas dire qu’elle puisse être modifiée dès le moindre événement, au contraire elle se précise et s’affine avec eux.

L’impératif, sur lequel repose le capital, la production de plus-value, entraîne inévitablement l’usage de la nature sans se soucier des conséquences, c’est à dire sa destruction progressive. La cupidité des bourgeois ou la nature humaine n’en sont pas la cause. Les marxistes défendent cette position depuis longtemps bien avant la naissance de l’écologie politique.

Contrairement à ce que nos détracteurs affirment la question des rapports de l’humanité avec la nature, est loin d’être absente des questionnements des communistes. Marx, suite aux travaux du chimiste allemand Liebig, s’est intéressé aux effets de l’agriculture sur la fertilité des sols. Engels et Bordiga se sont inquiétés des conséquences de l’urbanisation croissante. Les communistes ont ainsi depuis longtemps inscrit dans leur programme la fin de la séparation entre la campagne et la ville, en vue de la répartition harmonieuse de la population sur les territoires. Engels a réfléchi au gaspillage engendré par la production marchande, qui multiplie les intermédiaires et les transports. De fait une partie des productions seront relocalisées, orientées vers la consommation directe, seules celles nécessitant une échelle plus grandes garderont une dimension « nationale » ou internationale. La production pour la satisfaction des besoins humains et non plus le profit signifiera la fin des productions inutiles ou nuisibles, la fin de obsolescence programmée. L’anarchie de la production et la concurrence disparaissant, la production de biens ayant la même fonction mais de qualité différente cessera. De même tout phénomène de mode ou de publicité et l’industrie du luxe n’auront plus lieu d’être. Nous ne pouvons qu’à peine imaginer l’économie de ressources, d’énergie et de travail que cela engendrera, il en résultera autant de pollution en moins. Par exemple, 1,3 milliard de tonnes de nourriture sont jetées ou perdues chaque année, ce qui correspond à 1/3 des aliments produits sur la planète (13)! Enfin le prolétariat héritera d’un appareil productif et d’une technologie développés mais répondant aux exigences de la valorisation, ils seront désormais mis au service de l’humanité. Libérées de cet impératif de rentabilité, l’inventivité et la créativité du prolétariat pourront s’épanouir. Il est difficile d’imaginer le potentiel que cela représente.

Mais ce qui est fondamental et qui nous distingue des écologistes, c’est la façon dont nous envisageons la destruction du capitalisme et de l’État. L’écosocialisme et l’écologie sociale sont deux formes de réformisme relookées. Le premier prétend utiliser l’État bourgeois et l’autre le nie. Tous les deux escamotent le programme révolutionnaire sous-couvert de remédier aux manquements des marxistes ou simplement d’incorporer la question de l’écologie à leurs positions. Le programme reste inchangé : prise du pouvoir politique par le prolétariat, destruction violente de l’Etat bourgeois et dictature de notre classe afin d’étendre la révolution et de transformer les rapports sociaux. Il n’y a pas d’autre voie, aussi impensable puisse-t-elle paraître aujourd’hui. Pour cela, notre classe a besoin de son parti,organisé à l’échelle mondiale, distinct et opposé à tous les partis existants afin de l’orienter dans la lutte, c’est ce à quoi notre organisation entend contribuer.

GRI
Mars 2024
Source image : PEPS pour une écologie sociale et solidaire confpeps.org

Notes :

(1) Les collapsologues et autres partisans de la théorie de l’effondrement en ont fait leur fonds de commerce.

(2) Voir "L’écosocialisme : « rouge à l’intérieur, vert à l’extérieur », mais 100 % bourgeois !

(3) Une théorie n’est jamais le produit d’une seule personne mais par commodité nous reprenons cette simplification.

(4) Extrait de « Lettre ouverte au mouvement écologiste » issu du recueil Pouvoir de détruire, Pouvoir de créer » publié aux éditions de L’échappée

(5) Extrait de « Le municipalisme libertaire : une nouvelle politique communale », issu du recueil précédent.

(6) Extrait de La guerre en Espagne, dans le bulletin interne de la Fraction italienne

(7) Extrait de Bordiga « Le principe démocratique » 1922. marxists.org

(8) Voir libcom.org

(9) Le PYD, Parti de l’union démocratique, a été fondé par des membres syriens du PPK, le changement d’idéologie ayant entraîné des changements organisationnels. Le PKK a ainsi fondé plusieurs partis « frères » au Kurdistan.

(10) Pour plus d’informations, voir leftcom.org

(11) Ce qui n’empêche un groupe comme l’Offensive d’appeler à suivre « le modèle des Assayish du Rojava afin de supprimer l’institution policière et de la substituer par des organes de sécurité démocratiques, contrôlés directement par le peuple et respectueux des diversités. »

(12) Voir leur site : confpeps.org et offensive.eco

(13) Source zero-gachis.com

Saturday, January 25, 2025