Le BIPR, Notes Internationalistes et le U.S. Workers Voice

Polémiques récentes

Le regroupement des militants canadiens et américains du BIPR dans une entité nouvelle maintenant appelée Groupe Internationaliste Ouvrier (G.I.O.) s’est réalisé sans la participation du U.S. Workers Voice, autrefois connu comme le Los Angeles Workers Voice (LAWV). Jusqu’à récemment, le BIPR considérait que le LAWV était un groupe sympathisant qui travaillait vers un rapprochement politique et éventuellement, son intégration en bonne et due forme dans le Bureau. Il est important de souligner que ce n’est plus le cas. Le BIPR ne considère plus que le groupe de Los Angeles est en mesure de défendre ses positions politiques, ses buts et ses méthodes de travail.

Lors d’une rencontre en avril 2000 des sympathisants nord-américains du BIPR à Montréal, les délégués du LAWV avaient convenu que tous les camarades américains devaient travailler à transformer Internationalist Notes (U.S.), alors publié par un seul camarade du Wisconsin, en une publication régulière pour distribution à travers les États-Unis. En pratique, cette décision fut combattue par le LAWV qui révéla qu’il n’avait aucune intention de rompre avec son localisme, un localisme motivé par une réticence de voir son travail se diriger vers un niveau politique et organisationnel cohérent et clairement définit. Ainsi, même si le LAWV avait formellement accepté de travailler en tandem avec le Bureau, les divergences entre nous augmentaient. Plutôt que de confronter ces différences politiques à mesure qu’elles se manifestaient, le LAWV préféra les ignorer et créa de toutes pièces un écran de fumée de diversions et d’attaques virulentes contre un autre camarade américain en exigeant son expulsion du Bureau.

Le Bureau s’y ait refusé mais espérait toujours gagner ces camarades à une vision plus large de leur travail. D’une certaine façon cela sembla réussir dans la mesure où ils s’engagèrent à prendre la responsabilité de publier Internationalist Notes Volume III. À sa parution cependant, le bulletin était signé ‘U.S. Workers Voice Magazine’, sans références à l’existence de d’autres sympathisants du BIPR aux U.S.A. ni la reconnaissance des contributions extérieures à L.A. Cela n’était pas un accident. À la critique qu’il devait y avoir une discussion collective de tous les camarades américains sur le contenu de la publication, L.A. répliqua que c’était dorénavant ‘la majorité’ (eux seuls) qui déciderait. Drôle de manière de résister à une pratique ‘autoritaire’!

À partir de là, il ne restait plus grand chose pouvant caractériser la publication comme étant de la Gauche communiste. D’importantes divergences politiques s’étaient rajoutées aux questions organisationnelles. L.A. renversa soudainement sa position précédente sur la Révolution russe, affirmant maintenant qu’elle avait échoué à cause "de l’usurpation étatiste bureaucratique du pouvoir soviétique en 1918 par le Conseil des commissaires du peuple pro-bolchevique". Le BIPR répondit que:

lorsque vous écrivez que la Révolution russe se termina en 1918, vous faites pour l’essentiel cause commune avec les anarchistes et les conseillistes qui rejettent aussi la nécessité d’une organisation prolétarienne autre que les conseils. Nous nous basons sur la conviction que la Révolution russe n’était que la première étape de la révolution mondiale. Cela n’était pas seulement la position de la direction russe mais aussi celle de Rosa Luxemburg. Même s’il est possible que le processus révolutionnaire commença à reculer avec la Guerre civile, cela ne représente pas pour nous le facteur décisif. La question décisive restait la lutte des classes à l’échelle internationale. Affirmer que la Révolution russe était terminée avant même que les prolétaires des autres pays n’aient pu réagir n’est pas conforme à l’internationalisme défendu par la Gauche communiste depuis tant d’années.

Par conséquent, le Bureau décida de formaliser sa relation avec L.A. sur une base nouvelle, externe, c’est-à-dire reconnaître de facto la scission. Son approche à la rupture inévitable fut la plus amicale et dénuée de sectarisme possible dans une telle situation. Il a écrit:

Se peut-il que vous soyez de la ‘Gauche communiste’ en général mais pas de notre tendance? Peut-être que vous évoluerez vers nous avec le temps ou peut-être évoluerez-vous vers une autre tendance. L’important est que vous évoluez. Pour notre part nous entendons rester en contact avec vous (comme avec toute tendance émergeante) en débattant des principales leçons de l’histoire du prolétariat et en vous faisant parvenir des commentaires sur vos publications. Nous vous inviterons peut-être même à nous rejoindre dans certaines déclarations internationales si le niveau d’entente le permet. Nous vous encourageons à étudier toutes les tendances de la Gauche communiste dans le but de clarifier votre propre base politique (...). Nous vous souhaitons tout le succès possible dans votre travail de clarification politique et nous souhaitons des relations amicales à l’avenir.

Puis, post hoc, sans que cela ne soit jamais apparu dans la discussion, The New Internationalist, la nouvelle publication de L.A. accusa le BIPR d’être ‘non-prolétarien’ sans oublier de l’accuser de favoriser des méthodes bolcheviques ‘d’élitisme hiérarchique et d’autoritarisme’. Le groupe de L.A. avait de toute évidence décidé de se réfugier dans les mensonges et les calomnies pour éviter toutes nouvelles discussions. Ce à quoi ils s’objectent ce n’est pas un modèle bolchevique d’organisation mais toute forme d’organisation au-delà de leur petit cercle. Tel qu’il est, le U.S. Workers Voice demeure un vague regroupement d’individus qui ne soutiennent aucunement un ensemble de positions claires et se montrent incapables d’un travail conjoint à l’extérieur de leur propre cercle.

À cette situation déplorable s’est ajouté une intervention tout aussi déplorable d’Internationalism, la section américaine du Courant Communiste International (CCI). Dans une soi-disant défense du milieu révolutionnaire, le CCI a lancé une offensive contre ce qu’il qualifie "d’attaques parasitaires du LAWV à l’encontre du BIPR". Le CCI a de toute évidence des comptes à régler et avancent toutes sortes de critiques, certaines justes, d’autres erronées, pour faire le procès de nos ex-compagnons de route. Une des accusations est "qu’ils ont tenu des discussions politiques et organisationnelles secrètes à Los Angeles". Comme à son habitude, le CCI manque nettement de proportions dans ses accusations. Même si le groupe de L.A. souffre clairement de localisme, le CCI sent le besoin d’en rajouter dans sa tentative de les caractériser comme des parasites de manière à accréditer sa propre théorie sectaire sur le parasitisme. Comment diable les gens de L.A. devaient-ils se réunir autrement qu’entre eux lorsque le militant du BIPR le plus près de leur localité vivait quand même à plusieurs centaines de kilomètres? Cela a permis au LAWV de répondre à l’accusation du CCI d’une façon qui peut laisser entendre que le BIPR aurait pu exiger une sorte de présence obligatoire lors de ces réunions. Ils accusent aussi le CCI de soutenir la suppression de la révolte de Kronstadt comme une ‘tragique nécessité’ ce qui est absolument faux. Ainsi, l’attitude des deux parties dans cette ‘polémique’ n’est guère prometteuse pour ceux et celles d’entre nous qui souhaitons que des clarifications émergent des débats entre organisations révolutionnaires. En effet, l’intervention du CCI dans cette affaire n’a rien à voir avec la défense du ‘milieu’ révolutionnaire pour reprendre son vocabulaire. Il n’y a pas si longtemps, sa section britannique accusait nos propres camarades de la CWO (section du BIPR au Royaume-Uni) d’être tombés victimes de ‘parasitisme politique’ (voir World Revolution # 190)! En l’occurrence, le CCI tente d’utiliser sa théorie du parasitisme (peu importe les motivations initiales de cette théorie), qui lui permet habituellement de trouver des boucs-émissaires chez la plupart de ses ex-membres et à peu près tous les groupes non-membres du CCI, pour mater sa propre crise causée par les récentes expulsions/démissions d’une bonne partie de sa propre direction. En parlant de ces derniers, Internationalism en arrive même à les qualifier d’ordures... Cela dit, le nouveau G.I.O. ayant fait connaître ces remarques obligatoires sur nos récents développements n’a nullement l’intention de s’abaisser dans cette catégorie de ‘polémiques’ qui ne sont d’aucune utilité pour la clarification politique et conséquemment, d’aucun intérêt pour le mouvement révolutionnaire et le prolétariat international. Nous allons de l’avant.

Le Groupe Internationaliste Ouvrier